Le 30 juin 2014, un communiqué de presse retranscrivait les résultats d’une étude effectuée par le CHU de Nice et Solidages (société spécialisée dans la recherche sur la santé buccale et la nutrition) concernant les dangers des médicaments écrasés dans l’alimentation des seniors, en particulier en matière de dénutrition. Bien que de multiples recommandations aient déjà été effectuées à ce sujet, il semblerait que cette pratique perdure, pourtant…

L’étude CHU de Nice et Solidages : le médicament écrasé tue le goût mais pas seulement

Les personnes âgées ou dépendantes, ont bien souvent des difficultés à ingérer leur alimentation tout comme leurs prescriptions médicales. Ainsi bien souvent pour en faciliter la prise, les gélules sont ouvertes et mélangées au mortier à un aliment liquide de type compote ou eau gélifiée. Cette méthode très compréhensible de par les difficultés de temps et de gestion du personnel hospitalier ou de soin, est toutefois relativement dangereuse à deux points de vue : le premier est pharmacologique, le second qui semblerait moins établi mais notable sur des personnes fragilisées, serait gustatif.

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des principes actifs tolèrent mal l’écrasement
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des médicaments distribués sont écrasés par les IDE
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des patients en fin de vie souffrent de dénutrition
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des IDE s’estiment assez informés sur ces sujets

Ainsi il a été démontré par une enquête menée en juin 2009 auprès des malades de 23 unités de gériatrie de la région de Rouen  qu’un tiers des médicaments étaient écrasés pour être donnés aux patients, tous types de pathologies concernées, mais que pour 42 % de ces mêmes médicaments il était contre-indiqué de le faire ! « Ces pratiques entraînent non seulement un risque d’interaction entre les principes actifs des différents médicaments, mais également avec les ingrédients auxquels on les mélange pour faciliter leur ingestion, en raison de leur pH ou de leur température qui peuvent entraîner des réactions chimiques indésirables. » selon le professeur Doucet du CHU de Rouen.

Sur des personnes fragilisées et vieillissantes à l’appétit diminué et au goût délicat, ces effets indésirables seront bien sûr démultipliés

Toutefois, les actions menées conjointement entre le CHU de Nice et Solidages, ont voulu pousser cette révélation encore plus loin en effectuant de nouveaux tests : la dangerosité ne viendrait pas uniquement du mélange des substances mais aussi des conséquences de leur goût sur l’appétit de nos aînés.

Le protocole de cette expérience a donc inclus 8 professionnels du goût, dont 2 chefs étoilés Michelin, des psychologues, des représentants des usagers et 8 médecins, pharmaciens, chirurgiens-dentistes et aides-soignants du CHU de Nice et de maison de retraite (EHPAD) des Alpes-Maritimes. Le résultat est sans appel : « Sur les 10 médicaments testés, 6 sont trop amers, 3 ont été jugés mauvais, 3 très mauvais et le mélange de 6 médicaments a été qualifié d’insupportable par l’un des chefs. ».

Évidemment, sur des personnes fragilisées et vieillissantes à l’appétit diminué et au goût délicat, ces effets indésirables seront bien sûr démultipliés, ce qui pourrait être une des causes probables de leur dénutrition. Cette étude veut donc mettre ce problème grave en exergue pour tirer la sonnette d’alarme mais aussi pour trouver des solutions.

Des alternatives aux gélules écrasées : un constat, plusieurs possibilités

Le professeur Doucet lors de la première étude sur le sujet admettait toutefois que « Ces erreurs s’expliquent par l’absence flagrante de guides de bonnes pratiques et concerne tout autant les patients hors hôpital. C’est pourquoi il est urgent de fournir des recommandations aux médecins de ville, au personnel des établissements de santé, mais aussi aux pharmaciens de ville en contact avec les patients concernés ou leurs auxiliaires de vie ».

La question est donc bien sûr de changer des habitudes par d’autres plus appropriées plutôt que de pointer du doigt un personnel qui bien souvent appliquent des directives avec le matériel en sa possession. Voici donc les recommandations officielles publiées par la HAS dans les guides suivants : Outils de sécurisation et d’auto-évaluation de l’administration des médicaments  et la Liste des comprimés non sécables et non broyables.

Ainsi il est devenu indispensable d’adapter les traitements au mode d’administration des personnes fragilisées qu’ils soient âgés ou enfants, car, au final le même problème se pose, bien que les conséquences pédiatriques sembleraient différentes des gériatriques. Il faut nécessairement que les prescripteurs agissent pour limiter dans la mesure du possible le nombre de médicaments sur l’ordonnance ou trouver d’autres solutions (autres formes, autres molécules, moins de prises au cours de la journée…).

D’autre part limiter ces mélanges ne suffit pas et redonner le goût de manger à des personnes qui ne l’ont plus peut se recréer en leur donnant des aliments mieux adaptés à leur besoin nutritionnel, qui de par leur aspect appétissant séduisent et de par leur métabolisme étudié et breveté nourrissent bien plus qu’ils ne veuillent bien le montrer. C’est ainsi que la petite galette Protibis a fait le succès de cette belle association du privé et du public, entre le CHU de Nice et Solidages redonnant par le plaisir de croquer et de mastiquer, l’énergie nécessaire à nos anciens pour vouloir de nouveau dévorer la vie !

Et vous les IDELs, quelles sont vos pratiques en matière d’administration des médicaments des personnes âgées ? Pensez-vous que ce type de nouveau protocole puisse être concret ? Avez-vous noté une évolution des prescriptions des médecins afin de faire disparaître le problème de dénutrition et d’interaction médicamenteuse ?