Peut-être en avez-vous déjà entendu parler mais le 10 septembre 2014 à l’institut Bergonié de Bordeaux (un institut spécialisé dans la lutte contre le cancer) un patient est mort suite à l’erreur probable, l’affaire n’a pas été encore jugée, d’une étudiante infirmière dans l’administration d’une injection. Cet évènement tragique, où toutes nos pensées vont tant vers la famille du défunt que vers l’étudiante et sa tutrice, nous rappelle qu’aucun professionnel n’est à l’abri d’une erreur…

Le tragique évènement de l’Institut Bergonié de Bordeaux

Le mercredi 10 septembre 2014 un patient sexagénaire perdait la vie à l’institut Bergonié après avoir été admis le 25 aout 2014. Son décès serait dû selon un communiqué de l’Institut à une « erreur d’administration médicamenteuse ». Le patient pris en charge par une étudiante infirmière de 3ème année, assistée de sa tutrice ainsi que de la famille du patient présente à ce moment, aurait administré une injection de chlorure de potassium (normalement dilué) en lieu et place de l’injection de corticoïdes prescrite ce qui lui aurait provoqué rapidement des difficultés respiratoires entrainant sa mort. De suite, l’Institut Bergonié a prévenu les autorités compétentes qui ont entendu la jeune étudiante en soins infirmiers et sa tutrice. Elles ont reconnu les faits mais n’ont pas été mises en garde de vue.

Après l’autopsie du corps effectuée le jeudi 11 septembre, le Parquet a confirmé que l’injection était bien la cause du décès du patient. Toutefois la procureure en charge du dossier, Mme Alliot, ajoute que « deux seringues se trouvaient à disposition de l’infirmière lors de l’injection » ainsi « l’emballage était étiqueté, mais pas la seringue », a-t-elle précisé, ce qui pourrait laisser à penser que ce drame est la conséquence d’une erreur d’inattention, ou peut-être de l’étiquetage du produit lui-même. Un problème malheureusement trop récurent encore dans nos hôpitaux français.

En effet suite à cette affaire, plusieurs questions se posent. Tout d’abord celle, selon le Parquet en charge de l’affaire, « d’éventuelles difficultés de personnels, d’encadrement ou de pression  au sein du service »  l’enquête devra donc rechercher les responsabilités pénales de chacun des membres de l’équipe soignante. L’hôpital a également diligenté une enquête interne « pour déterminer précisément l’origine des faits ». Car si faute il y a de la part de l’étudiante, le défunt patient s’est vu administré « par erreur en intraveineuse directe cette dose de potassium qui aurait dû être administrée à un autre patient qui se trouvait dans une autre chambre », selon Mme Alliot, ce qui laisse présupposer que l’erreur n’est pas uniquement dû à l’aspirante infirmière mais aussi dans la préparation du produit et surtout dans sa destination.

Ainsi, comme le souligne Emmanuel Bussières, chirurgien et directeur de la politique médicale de l’institut Bergonié : « Malheureusement comme on le voit la séparation dans les offices est insuffisante puisqu’il y a eu cette interversion de médicaments. Il y a des strates de vérification (…) mais, on voit qu’il y a eu une faille ».

Comment éviter l’erreur médicale, quelles sont les responsabilités de chacun ?

Rappelons avant toute chose le communiqué établi après ce tragique accident par les élèves de la FNESI (Fédération Nationale des Elèves en Soins Infirmiers) : « Les infirmiers et infirmières se forment et travaillent en sachant que l’erreur est possible et ce malgré les efforts institutionnels, hiérarchiques, pédagogiques et individuels mis en place pour les gérer. C’est ce qui aujourd’hui pourrait faire dire à tout professionnel, à tout étudiant : “ça aurait pu être moi” ».

erreurs medicales infirmiers

Malheureusement aucun professionnel n’est à l’abri de l’erreur, surtout quand le travail est un travail d’équipe qui demande une coordination de services sans avoir toujours les moyens de le faire parfaitement.

En effet, suite à cette affaire, certains professionnels de santé ont souhaité réaffirmer haut et fort l’absolue nécessité de la lecture code-barres à l’hôpital. Comme François Pesty qui s’insurge  que les procédés simples d’impression sur étiquettes par un logiciel qui mentionnerait toutes les indications nécessaires, surtout celles d’identification du patient et de posologie du médicament, ne soient pas encore utilisés pour l’administration des soins. Notamment pour les injections où l’infirmière écrit encore au marqueur sur les poches, ce qui rend parfois l’écriture peu lisible… Dommage en 2014 !

En particulier lorsque l’on sait que « les médicaments doivent rester identifiables jusqu’au moment de leur administration » selon l’arrêté du 6 avril 2011, article 13. Selon lui avec ce type de système informatisé ce genre d’erreur ne pourrait plus se produire et éviter bon nombre d’accidents médicamenteux du même ordre…

Enfin, rappelons que si la responsabilité de la tutrice n’est pas mise en cause dans cette affaire, il reste possible que sa responsabilité soit retenue pour n’avoir pas correctement évalué la capacité de l’étudiante, vérifié ce qu’elle a compris ou surveillé celle-ci lors de la réalisation de l’acte technique.

Toutefois seul l’étudiant est responsable de ses actes comme l’indique le juriste Emmanuel Poirier. « Au même titre que tout infirmier confirmé, il doit à son patient des soins attentifs et consciencieux et répond de ses responsabilités civile, pénale et disciplinaire. ».

Ainsi donc, la famille du défunt de l’institut Bergonié a porté plainte non pas pour stigmatiser l’Institut mais pour pouvoir comprendre comment les faits se sont déroulés et pouvoir tenter d’accepter l’inacceptable.

Idels, n’oublions pas cette phrase « Ça aurait pu être moi »…

 Et vous, infirmières et infirmiers libéraux, que pensez-vous de cette tragique affaire ? Pensez-vous que l’étiquetage des médicaments sous code-barres serait une bonne solution pour éviter ces erreurs médicales dramatiques ?