La fin de la longue concertation gouvernementale de deux ans et demi sur cette difficile question est arrivée le vendredi 12 décembre avec la présentation des députés, Messieurs Claeys et Leonetti, de  leur proposition de loi sur la fin de vie. Si la loi Leonetti de 2005 avait déjà posé des cadres, cette nouvelle loi veut en fixer d’autres, en particulier en imposant les directives anticipées choisies par le patient et en instaurant un droit à la sédation profonde et continue.

La loi Léonetti de 2005 et la création de la loi de fin de vie 2014/2015

La loi Leonetti du 22 avril 2005 avait déjà permis de légiférer sur cette épineuse question de société, d’éthique et de santé. En effet elle avait déjà clarifié le droits du patient en phase terminale à refuser des soins (article L.1110-10), proscrivait tout acharnement thérapeutique du patient  « ces actes ne doivent pas être poursuivis par une obstination déraisonnable » (article L1110-10), instaurait un droit au « laisser mourir »  et enfin cautionnait les directives anticipées des patients pour leur fin de vie en demandant qu’elles soient prises en considération par l’équipe médicale.

Malheureusement, cette loi, bien qu’essentielle dans la question du libre-arbitre du patient n’a pas été suffisamment suivie des faits. Selon la mission de réflexion menée par le Pr Sicard, cette loi est « sans visibilité, mal appliquée, voire inappliquée ».

Il fallait donc une nouvelle consultation et une nouvelle législation plus aboutie et plus ferme sur cette terrible question qui nous concerne tous. Le Président de la République a donc lancé depuis deux ans et demi maintenant de larges investigations. Tout d’abord par le biais de la mission Sicard, du CCNE et d’une conférence de citoyens, afin d’aboutir à un texte de loi qui « puisse être élaboré sans polémiques, sans divisions et simplement dans l’idée qu’un cheminement est possible pour rassembler toute la société »  selon Monsieur Hollande en janvier 2013.

Quelles mesures seront prises dans cette nouvelle loi de fin de vie Claeys/Leonetti?

Le nouveau texte proposé le vendredi 12 décembre au Président de la République par les deux députés Claeys et Leonetti se voit donc être la réponse à de multiples questions.

Il aborde en premier lieu un droit à une sédation profonde et continue en phase terminale du patient afin de soulager ses souffrances, ce qui exclut par le fait la question du suicide assisté ou de l’euthanasie, largement critiqués par ailleurs dans le rapport de la CCNE : « Ils

[les membre du comité] considèrent que le maintien de l’interdiction faite aux médecins de provoquer délibérément la mort  protège les personnes en fin de vie, et qu’il serait dangereux pour la société que des médecins puissent participer à donner la mort ».

De plus, les directives anticipées de fin de vie émises par le patient ne seront plus considérées comme des préférences face à l’équipe médicale mais comme des directives imposées qui seront des formulaires standards, sans durée de validité et apposées sur la Carte Vitale du patient.

Ce projet de loi, bien que trop longtemps en gestation pour certains, se veut lancer à l’initiative de Monsieur Hollande un débat général à l’Assemblée Nationale dès janvier 2015.

On pourrait penser de ce projet que c’est un texte consensuel qui devrait à priori rassembler plus que diviser, toutefois il est évident qu’il ne pourra contenter ni les partisans du suicide assisté et de l’euthanasie, ni les militants « pro-vies ». Comme l’annonce déjà Alain Claeys « Le débat de société, légitime, entre laisser mourir et faire mourir ne s’arrêtera pas avec cette proposition de loi ».

En effet, de multiples questions se posent et se poseront encore… Nous savons par exemple que dans votre cas d’infirmiers libéraux, la question de la fin de vie à domicile n’a, à priori, toujours pas été abordée de nouveau. Nombre de modifications seraient nécessaires afin d’apporter un cadre d’apaisement aux malades, aux aidants et aux professionnels (les IDELs ou les médecins généralistes) pour rendre la possibilité à tous de mourir à domicile, ce qui est souhaitée par 80 % de la population française selon l’Observatoire Nationale de la Fin de la Vie. Pourtant seulement 25,5 % des décès se déroulent effectivement au domicile du défunt, toujours selon l’ONFV, pour de multiples causes.

« Le vote de cette loi constituera un grand progrès. Mais il ne faut pas seulement ouvrir le droit. Il convient aussi de faire évoluer les mentalités, les attitudes, les pratiques. » (François Hollande, Le Monde, 12 décembre 2014).

Infirmières et infirmiers libéraux, que pensez-vous de cette nouvelle proposition de loi faite par les députés Claeys et Leonetti? Croyez-vous que l’opportunité de ce débat puisse ouvrir à nouveau des possibilités concernant la fin de vie à domicile et les soins palliatifs ? Quelles sont vos expériences en tant qu’IDELs, lié ou non à une HAD, concernant les patients que vous avez eu à gérer en fin de vie ?