Longtemps utilisés par les seuls services oncologiques, les traitements anticancéreux peuvent désormais, dans certaines situations définies par la loi, être administrés au domicile du patient. Qu’en est-il du risque de ces substances cytotoxiques et comment les infirmières libérales peuvent s’en protéger ?

Les médicaments cytotoxiques, un danger invisible mais bien réel !

La définition de ces médicaments dits cytotoxiques ou cytostatiques est désormais bien connue de tous les professionnels de santé, et notamment des infirmières libérales. Ces substances ont des répercussions sur le cycle de reproduction des cellules de l’organisme, ce qui en fait des substances potentiellement dangereuses. Les effets, qui peuvent prendre diverses formes, sont identifiés par les équipes soignantes, qu’il s’agisse de services hospitaliers ou d’infirmiers libéraux.

Les conséquences directes mais aussi les effets secondaires de ces cytotoxiques font régulièrement l’objet de communication de la part des autorités de santé. Il s’agit alors de s’assurer de la santé du patient d’une part mais aussi de la protection des soignants d’autre part.

Les médicaments cytotoxiques les plus récurrents restent ceux utilisés dans les services d’oncologie, les chimiothérapies des cancers même si il ne faut pas négliger les immunomodulateurs. Même à très faible dose, une exposition prolongée à ces cytotoxiques implique des effets secondaires voire des maladies. L’irritation cutanéo-muqueuse, les réactions asthmatiques, les troubles digestifs les céphalées font partie des effets secondaires, qui se font rapidement sentir. Dans le temps, cette exposition pourra entrainer des mutations génétiques, une reprotoxicité (stérilité, avortements spontanés,…), des cancers, ….

Les conséquences sont donc suffisamment graves pour que les infirmières et infirmiers libéraux comme tout le personnel soignant, mettent tout en œuvre pour limiter ce risque de contamination.

Quand les infirmières doivent aussi penser à se protéger

Les infirmières et les infirmiers libéraux ou hospitaliers sont, comme tous les soignants, susceptibles d’être en contact avec ces substances toxiques pendant une période plus ou moins longue. Il convient alors d’adopter toutes les mesures utiles et nécessaires pour s’en protéger, et cela commence par la prise de conscience des différents modes de contamination, qui sont la contamination par :

  • Voie respiratoire avec les aérosols liquides notamment
  • Voie cutanée avec un contact direct avec la peau
  • Voie digestive avec ingestion involontaire (le plus souvent à cause des mains souillées, portées à la bouche)

Ces modes de contamination peuvent exister à chaque étape du traitement, que ce soit pour le patient ou pour le personnel soignant, et à l’hôpital comme à domicile, chaque étape doit faire l’objet d’une prévention spécifique.

Prévention adaptée à chaque étape du traitement avec les médicaments cytotoxiques

Pour que cette prévention soit la plus efficace possible, elle doit prendre en compte les différents moments, où le risque existe, depuis la réception du produit (manipulation et rangement avec risque de contact ou d’inhalation) jusqu’à l’élimination du linge souillé et des déchets, en passant bien évidemment par les soins eux-mêmes.

Toutes les précautions doivent donc être prises tout au long du contact entre ces substances potentiellement dangereuses et le personnel soignant. On retrouve aussi la présence de ces substances dans les selles, urines, salive des patients après administration, et il conviendra donc de prendre en compte ce risque, que ce soit pour le patient, son entourage ou les soignants.

Le port de gants, d’une blouse d’un masque (si utilisation d’aérosols) et de lunettes de protection s’impose notamment à tous les soignants, en tenant compte de la situation de chaque patient et du mode d’administration.

Infirmières et infirmiers libéraux et traitements cytotoxiques, quelles règles ?

La réglementation quant à la gestion et l’utilisation de ces substances en dehors des établissements hospitaliers répond à une législation plus restrictive encore. Certains médicaments cytotoxiques pourront ainsi être utilisés directement au domicile des patients dans le cadre de l’Hospitalisation à Domicile (HAD) d’une part ou par une infirmière libérale spécialement formée à cet effet. L’infirmier ou l’infirmière devra alors faire partie d’un réseau de santé en cancérologie et respecter les obligations, imposées par l’arrêté du 20 décembre 2004.

De la préparation à l’administration de ces traitements anticancéreux, la législation encadre très précisément l’action de l’infirmière libérale, qui se devra notamment de surveiller le patient pendant toute la durée de la perfusion. L’administration de ces médicaments cytotoxiques par l’infirmière ou l’infirmier libéral ne pourra pas être effectuée sans qu’un médecin puisse intervenir en urgence.

Même si les infirmiers libéraux sont formés à l’administration de ces substances dangereuses pour eux-mêmes, ils sont contraints de s’équiper selon les directives imposées par cet arrêté : tenue de protection notamment.

Il relève également de la responsabilité de l’infirmière libérale de faire connaître à l’entourage du patient les risques de contamination de ces produits cytotoxiques. Ce devoir d’information concerne également tous les aidants et les soignants intervenant au domicile du patient concerné. L’exposition d’une infirmière libérale à un médicament cytotoxique devra être déclaré et considéré comme un accident du travail.

Etes-vous formé à l’administration de ces médicaments cytotoxiques ? Avez-vous envisagé de suivre cette formation ?