Les infirmières libérales pensaient pouvoir profiter pleinement de ces vacances estivales. C’était sans compter sur une prise de position étonnante de Marisol Touraine, Ministre de la santé, sur le sujet des indemnités horo-kilométriques. Une nouvelle source d’inquiétude pour les infirmiers libéraux et une rentrée qui s’annonce tendue …

Des vacances attendues avec impatience par les infirmières libérales !

L’année 2015 -2016 aura été éprouvante pour les professionnels de santé en général, et plus particulièrement pour les infirmières et infirmiers libéraux. Il est inutile de revenir sur les innombrables épisodes qui ont opposé les infirmières libérales à leur autorité de tutelle (Parcours de santé, Tiers Payant généralisé, Rapport de la Cour des Comptes, ….). Ces tensions perceptibles au quotidien se sont développées dans un climat général anxiogène, et les cabinets d’infirmiers généraux comme les infirmières libérales exerçant en solitaire, furent aussi impactés par les attentats qui ont endeuillé notre pays. Autant dire que les infirmières et infirmiers libéraux se réjouissent de cette « trêve estivale », qui devrait leur permettre de reprendre des forces avant de voir s’accélérer les réflexions des autorités sanitaires sur la généralisation de l’hospitalisation à domicile (HAD) en France. De nombreuses questions restent en suspens à ce sujet, et les infirmières libérales sont bel et bien en première ligne lorsqu’il s’agit de s’interroger sur les soins effectués au domicile des patients.

On comprend mieux alors l’émoi et l’indignation des syndicats d’infirmières et d’infirmiers libéraux devant les prises de position de Marisol Touraine, Ministre de la Santé, d’autant plus que ces déclarations interviennent à une période peu propice à la négociation et à la prise de décisions.

Une rentrée qui s’annonce mouvementée pour les infirmières et infirmiers libéraux

Tout avait commencé en décembre 2015 en Savoie. La CPAM exigeait alors des infirmières libérales une révision de leur facturation des indemnités horo-kilométriques. La menace de sanctions et de réclamation d’indus n’intimidait pas les professionnels de santé de la région, qui refusaient d’abandonner la « facturation en étoiles » au profit de celle basée sur les « kilomètres réellement facturés ».

S’appuyant sur l’article 13 de la Nomenclature, les infirmières et infirmiers libéraux de Savoie estimaient infondés cette exigence subite et non motivée de la CPAM. Les relations se tendaient, la pression montait, et les infirmières libérales de France craignaient alors que cet épisode savoyard ne soit qu’un test avant une généralisation de cette mesure. Le premier trimestre 2016 permettait à la CPAM et aux autorités politiques d’atténuer ce conflit naissant, en expliquant prendre le temps de la réflexion avant de trancher dans un sens ou dans un autre. Etrangement, c’est à la veille de ces vacances estivales, que la Ministre de la Santé en personne, semble avoir mis un terme à cette polémique.

Une remise en cause des indemnités kilométriques, déjà décidée ?

En effet, en juin 2016 soit plus de 6 mois après le début du conflit, Madame la Ministre de la Santé a adressé un courrier à Bernadette Laclais, député de Savoie, lettre dans laquelle elle définit sans ambiguïté sa position :

« Les frais de déplacement du professionnel de santé sont remboursables en fonction de la distance réellement parcourue. Les frais de déplacement ne sont remboursés que dans le cas d’une visite dans une autre agglomération que le domicile professionnel et entraînant un déplacement de plus de 2 km en plaine et 1 km en montagne »

Selon Marisol Touraine, la facturation en étoile serait donc une erreur de la part des infirmières et infirmiers libéraux. Mme Touraine a beau expliqué avoir « demandé à ce qu’un dialogue entre la Caisse d’Assurance Maladie et les professionnels puisse avoir lieu » afin de définir précisément les règles applicables, il s’agit bien d’une reconnaissance de la demande originelle de la CPAM de Savoie. Les règles changent donc pour toutes les infirmières et tous les infirmiers libéraux de France.

Les infirmières libérales stigmatisées et condamnées à de nouvelles règles ?

Les syndicats FNI, Convergence Infirmière et ONSIL ont immédiatement réagi en adressant une lettre ouverte à Madame la Ministre de la Santé et au directeur général de l’UNCAM, M Nicolas REVEL. Ce courrier daté du 19 juillet démontre l’incompréhension face à une telle prise de position d’autant plus que « tous les professionnels intervenant au domicile facturent les Indemnités Kilométriques (IK) en étoile« .

Demandant une concertation et un dialogue, les syndicats affirment par avance leur soutien aux infirmières libérales, qui décideraient de cesser « leur activité dans les zones qui sont éloignées de plus de deux kilomètres de leur cabinet professionnel ou qui cesseraient totalement leur exercice quotidien« . Enfin, ils accusent les autorités d’une décision prise sans concertation en écrivant :

« vous portez un nouveau coup à notre profession qui trahit votre volonté de vous passer d’elle »

Les semaines à venir seront donc déterminantes pour qu’une position claire, précise et sans appel soit prise sur le sujet, même si la Ministre de la Santé semble bien avoir indiqué la voie qu’elle souhaitait suivre…la rentrée s’annonce donc encore mouvementée pour les infirmières et les infirmiers libéraux.

Quelle est votre position sur le sujet de ces indemnités horo-kilométriques ? Estimez-vous qu’une prise de position de la Ministre de la Santé à la veille de la pause estivale est un simple hasard ? Une volonté politique de profiter de la baisse de la vigilance et de la mobilisation des infirmières et des infirmiers libéraux de France ?