La volonté de mieux réguler et contrôler l’installation des infirmières et infirmiers libéraux en France fait partie des thèmes récurrents des hommes et des femmes politiques. La liberté des citoyens devant le système de santé est un enjeu majeur. Pourtant, la liberté de l’infirmière libérale en la matière est déjà réduite …

 

Le choix de son implantation, entre liberté et politique de santé publique

On caractérise souvent l’exercice libéral de la profession infirmière par la grande liberté, qui semble l’accompagner. Pourtant dès le choix de l’installation, les premières contraintes se font sentir brisant cette apparence de liberté. En effet, l’Assurance Maladie a établi une carte de France basée sur la présence des cabinets d’infirmières et infirmiers libéraux. Chaque ville de France est ainsi classée en fonction de la concentration d’IDEL(s) par rapport à la population. Des communes qualifiées de « très sous-dotées » aux villes surdotées, ce classement n’est pas que purement indicatif puisqu’il implique aussi des conséquences pratiques pour les infirmières et infirmiers libéraux en quête d’un lieu d’exercice.

5 niveaux de classements existent : très Sous-doté, Sous-doté, Intermédiaire, Très doté, Sur-doté. Pour faciliter l’accès à l’information, l’Assurance Maladie tient une carte de ce classement à jour. Les 3 classifications « normales » (Sous-doté, Intermédiaire et Très doté) n’entrainent aucune conséquence pour l’installation de l’infirmière libérale, à l’inverse des deux classifications extrêmes. Dans le but de lutter contre les déserts médicaux, les zones très Sous-dotées et celles Sur-dotées impliquent la mise en place de mesures spécifiques.

Des obstacles pour l’installation d’une infirmière libérale dans certaines villes de France

Certaines communes présentent une concentration de professionnels de santé, dont les infirmières libérales. L’objectif affiché des mesures suivantes consiste à restreindre la liberté d’installation dans ces villes de France. Pour cela, l’accès au conventionnement dans ces zones très doté a été conditionné. La demande d’installation ne sera donc acceptée que si elle fait suite à la cessation définitive d’une infirmière libérale conventionnée. A cette condition indispensable s’ajoute la nécessité d’inscrire cette demande dans une logique de continuité des soins. De manière concrète et pratique, cela doit se traduire par la reprise de patientèle ou par l’intégration au sein d’un cabinet infirmier déjà existant.

Cette remise en cause de la liberté d’installation d’une infirmière ou d’un infirmier libéral se justifie non seulement par une politique ambitieuse de santé publique (l’égalité de chacun face à l’accès aux soins implique que chaque région dispose d’un nombre suffisants de professionnels de santé) mais aussi par la volonté de protéger les professionnels concernés.

Des incitations pour attirer les infirmières libérales dans les villes les moins pourvues

Si la concentration trop importante d’infirmières libérales dans une ville entraîne une restriction de la liberté d’installation, le manque d’IDEL(s) dans d’autres est également combattu par les autorités publiques. Des mesures existent pour attirer les infirmières et infirmiers libéraux dans les villes les moins bien loties en la matière. Ces incitations ne concernent que les zones qualifiées de très sous-dotées.

Il est possible alors de signer un contrat incitatif infirmier que ce soit pour une installation ou pour une infirmière libérale exerçant déjà dans ces villes très sous-dotées. Le contrat est accessible pour les exercices en groupe (il faut alors une formalisation de ce contrat) ou pour un exercice solitaire. Dans ce dernier cas, l’infirmière libérale s’engage à faire appel régulièrement à un remplaçant pour assurer la continuité des soins. L’infirmière libérale doit, pour pouvoir bénéficier de ce dispositif :

  • Consacrer 2/3 de son activité dans la zone très sous dotée
  • Afficher un taux de télétransmission supérieur à 80 %
  • Participer aux campagnes de l’Assurance Maladie pour les vaccinations contre la grippe
  • Assurer le suivi des patients aux pathologies chroniques, notamment les patients insulino dépendants.

Ce contrat incitatif infirmier permet de bénéficier d’aides, versées à posteriori par la caisse d’Assurance Maladie se traduisant par :

  • La prise en charge de l’intégralité des cotisations dues à l’URSAFF au titre des allocations familiales
  • Une aide financière pour l’équipement ou les investissements réalisés d’un montant maximum de 3.000 euros par an pendant 3 ans.

 

La lutte contre les déserts médicaux et l’ambition affichée de garantir l’égalité de tous les Français pour l’accès aux soins restent deux thèmes récurrents de la campagne électorale actuelle. Ces mesures seront-elles jugées suffisantes, ou ne se dirige-t-on pas vers une plus grande intervention de l’autorité publique dans le choix du lieu d’installation des infirmières libérales ? Les semaines et les mois à venir devraient nous permettre d’y voir plus clair …

 

Que pensez-vous de la situation actuelle en ce qui concerne ces problématiques de concentration d’infirmières libérales dans certains secteurs ? Etes-vous favorable à une modification des règles en la matière ou estimez-vous, au contraire, que la situation actuelle est satisfaisante ?