Doctolib : les infirmières libérales inquiètes ?

 

En devenant un véritable partenaire pour le ministère de la Santé, Doctolib a changé de statut. En revanche, les inquiétudes et les craintes exprimées par les infirmières libérales et bien d’autres soignants n’ont pas disparu pour autant.

 

Les plateformes de mise en relation sont-elles devenues incontournables pour les soignants ?

 

Depuis plusieurs années, le débat fait rage dans le rang de tous les soignants et les infirmières et infirmiers libéraux n’y échappent pas. En effet, certains professionnels libéraux de santé soulignent depuis longtemps les atouts de ces plateformes de mise en relation entre les patients d’un côté et les soignants de l’autre. D’autres en revanche dénonçaient les dangers d’une telle évolution, soulignant notamment la perte d’indépendance de ces soignants mais aussi les questions relatives à la confidentialité et la sécurité des données. Bien qu’il existe de nombreuses plateformes de ce type, une domine sans conteste le marché : Doctolib.

Aujourd’hui, la question ne se pose plus en ces mêmes termes, car la crise sanitaire du coronavirus est passée par là. Depuis un an, les patients ont dû adapter leurs habitudes et les manières de se soigner. Les infirmières libérales comme l’ensemble des soignants ont dû, eux-aussi, appliquer des protocoles stricts mais aussi répondre aux multiples demandes des autorités, comme le dépistage ou la vaccination. Pour les infirmières libérales s’est ajoutée également l’accompagnement à l’isolement des patients. Depuis plus d’un an, les télé soins infirmiers sont devenus une réalité (et ils s’inscrivent désormais durablement dans le quotidien des IDEL(s)).

Les évolutions ont été nombreuses, et les autorités sanitaires n’ont cessé de s’appuyer sur Doctolib notamment pour mener à bien leurs différents projets. Aujourd’hui, la Licorne (terme pour désigner une start-up valorisée à plus de 1 milliard d’euros) Doctolib participe au succès de la campagne de vaccination. Aussi, la question de l’utilisation ou non de ce type de services pour les années à venir ne se pose plus dans les mêmes termes.

Un service d’intérêt général ou une réelle menace pour les soignants ?

 

Dès les premiers jours de l’épidémie, lorsque le ministère de la Santé incite les Français à privilégier la téléconsultation, les inscriptions sur Doctolib connaissent un bond exceptionnel, d’autant plus que la plateforme décide de rendre gratuit le service de téléconsultation pendant la crise épidémique. Patients et professionnels de santé s’en félicitent, et dès le départ, la plateforme privée s’efforce de faciliter le service aux professionnels comme aux patients. Depuis le début de l’année 2021, la plateforme gère les prises de rendez-vous pour les centres de vaccination. Pour certains, les menaces sont réelles comme l’écrivait Jean-Luc Mélenchon, président de la France Insoumise, en janvier dernier : « Une entreprise privée pourra donc ficher toute personne passée par ses mains. » Pourtant, M Stanislas Niox-Château, le fondateur de la société, insiste sur la mission publique de Doctolib depuis le début de la crise : « « On a mis 100 % des équipes au service de l’intérêt général ».

Non seulement Doctolib a attiré de nouveaux utilisateurs (aujourd’hui, le site compte 45 millions d’utilisateurs en France), de nouveaux professionnels (des infirmières libérales, des médecins, des kinés, …), mais la crise a également permis à la plateforme de toucher d’autres professionnels, qui étaient jusque-là absents de son univers, principalement les laboratoires d’analyse médicale et les pharmacies.

Et, les médecins, infirmières libérales et autres soignants sont de plus en plus nombreux à craindre ce « quasi-monopole » de Doctolib, devenu un véritable outil au service de la Santé Publique. Le 12 janvier dernier, Doctolib se félicitait même sur Twitter d’avoir été « sélectionné comme partenaire officiel de l’Etat pour permettre aux Français de prendre rendez-vous ». En s’imposant comme une référence dans l’univers de la Santé, Doctolib a donc renforcé sa position déjà ultradominante. Les infirmières libérales s’interrogent. Auront-elles le choix à l’avenir de ne pas s’inscrire sur Doctolib et de se priver ainsi d’une bonne partie des patients, qui ont désormais adopté cette plateforme ? Fondée en 2013, cette jeune plateforme de mise en relation est donc devenue un acteur majeur de la santé en France, ravivant les débats et les inquiétudes. Et les prochaines semaines devraient amener les autorités publiques à se prononcer sur cette situation monopolistique, qui n’est pas sans poser question.

 

Et vous, êtes-vous inscrite sur Doctolib ? Craignez-vous la situation monopolistique de cette plateforme de mise en relation ? Pourquoi ?