La pénurie d’infirmières libérales dans certaines régions de France et celle touchant certains établissements hospitaliers soulève la délicate question d’une refonte globale de la profession infirmière. Un constat, que les autorités publiques semblent (enfin) avoir dressé….

Une pénurie d’infirmières et d’infirmiers qui interroge

Depuis plusieurs semaines, les hôpitaux parisiens mais aussi ceux des grandes agglomérations tirent la sonnette d’alarme, en s’inquiétant du manque de personnel soignant. Une pénurie qui se concentre essentiellement pour la profession infirmière, et qui pousse de nombreux établissements à fermer un certain nombre de lits, voire de service complet. Alors que l’épidémie de coronavirus montre des signes de résurgence, la situation devient problématique.

Aux journalistes d’Egora, le docteur Julie Cosserat, spécialiste en médecine interne à l’Institut mutualiste Montsouris à Paris, explique :

« Il existe actuellement un déficit majeur d’infirmières et d’infirmiers dans un grand nombre d’établissements en région parisienne, dans certaines grandes villes. Nous sommes contraints pour notre part à fermer 30 % des capacités d’accueil de l’hôpital, notre service est réduit de moitié. «

La Fédération hospitalière de France (FHF) a même chiffré cette pénurie et ces tensions dans une analyse détaillée publiée en octobre dernier. Alors que le taux d’absentéisme des soignants atteignait 10 % (contre 8.5 % en 2019), la FHF relève que 2 % des postes d’infirmières étaient vacants en CHU, et même 5 % dans les CH. Pourtant, les hôpitaux de France ont recruté massivement au début de l’été, en signant de nombreux étudiants sortant des IFSI. Mais ces efforts n’ont pas empêché une dégradation de la situation, puisque l’Agence Régionale de Santé (ARS) précisait le 20 octobre dernier, qu’il manquait 2680 postes d’infirmières dans les hôpitaux publics et 1265 infirmières dans le secteur privé. ospitalière de

Redonner toute la place à la profession infirmière dans le système de Santé Publique

 

Les conditions de travail sont souvent avancées par les responsables RH des établissements hospitaliers pour expliquer un turn-over important dans la profession, et tous s’accordent à croire, que seul le renforcement de l’attractivité du métier d’infirmière hospitalière pourra répondre durablement à cette crise de la profession. Il ne s’agit pas d’une crise des vocations (la voie infirmière reste celle la plus demandée par les lycéennes et lycéens sur Parcoursup) mais bien d’une défiance vis-à-vis du système hospitalier.

C’est ce qu’explique la présidente de la Fnesi (Fédération Nationale des étudiants en soins infirmiers), Mathilde Padilla, en soulignant la « précarisation » de la profession. Elle dénonce la multiplication des contrats courts mais aussi la tendance de la « stagiarisation longue » . Tout cela conduit, selon elle, à rendre « l’hôpital de moins en moins attractif » pour les nouvelles infirmières. Une fois leur diplôme en poche, les étudiantes et étudiants en soins infirmiers privilégient plus volontiers l’intérim ou l’Hospitalisation à domicile (HAD), un choix leur permettant de garder plus de contrôle sur leur gestion « vie privée – vie professionnelle ». Mme Padilla admet également, que devenir infirmière libérale reste un choix de plus en plus plébiscité :

« Il y a un réel engouement pour le libéral, même s’ils ne peuvent pas s’installer avant d’avoir exercé deux ans. « 

 

 

Infirmière libérale ou hospitalière, une profession en danger ?

 

A en croire les principaux acteurs, interrogés par les journalistes d’Egora, le problème est bien plus vaste et dépasse ce déficit d’infirmières décidées à s’engager à l’Hôpital. Le ministre de la Santé lui-même, M Olivier Véran, se désolait qu’en 4 ans, plus de 1.000 étudiants en soins infirmiers n’avaient pas été au bout de leurs études. La crise de la Covid-19 a certes rendu la situation plus difficile, mais le président de l’Ordre des Infirmiers, M Patrick Chamboredon, s’alarme aussi des infirmières et infirmiers, choisissant de quitter l’hôpital. L’ampleur du phénomène reste difficile à évaluer, même si cela conduit M Chamboredon à affirmer avec force :

« Ce que nous voulons, c’est une revalorisation globale de la profession, une reconnaissance de nos compétences. « 

 

Et cet appel semble avoir été entendu, puisque le ministre de la Santé a confirmé que la refonte du métier infirmier figurait parmi les priorités de la DGOS pour l’année 2022.

 

Et vous, comment jugez-vous la situation de la profession infirmière en 2021 ? Estimez-vous que la refonte de la profession envisagée pour 2022 soit en mesure de solutionner une partie des problématiques ? Comment ?