La saison estivale approche et certains d’entre vous préparent déjà leurs prochaines vacances. Pour ceux qui ne partiront pas, la température risque de monter dans les prochains mois entre absences des collègues, remplacement des médecins et prescriptions médicales données au compte-goutte et pas toujours dans les règles. Certains évènements dramatiques comme l’histoire de votre consœur de Montauban doivent rappeler les règles que le médecin généraliste ou le médecin de garde sont dans l’obligation de suivre pour vous transmettre leurs ordonnances.

Les ordonnances du médecin : les conditions de transmission légales admises à destination de l’infirmier libéral

Avoir une prescription écrite en bonne et due forme ne peut empêcher toutes les erreurs médicales humaines. Dans le cas de votre collègue IDE de Montauban, il s’agit d’une multitude de dysfonctionnements qui ont créé cette erreur fatale. Un décès dû à une erreur professionnelle de l’infirmière mais aussi à la prescription orale d’un médecin de garde qui aurait dû être sur les lieux d’une part et donner ses instructions par écrit d’autre part. C’est la raison pour laquelle la famille du patient décédé va aussi porter plainte contre l’hôpital de Montauban.

Ces biens tristes évènements nous rappellent que pour améliorer la communication entre médecin et infirmier ainsi que la prise en charge du patient, la bonne transmission de l’ordonnance est essentielle. Elle est de plus, très encadrée légalement bien que ces cadres soient un peu trop souvent oubliés…

« L’infirmier ou l’infirmière est habilité à pratiquer les actes suivants soit en application d’une prescription médicale qui, sauf urgence, est écrite, qualitative et quantitative, datée et signée, soit en application d’un protocole écrit, qualitatif et quantitatif, préalablement établi, daté et signé par un médecin », Article r 4311 7 du Code de la santé publique.

De plus, les moyens technologiques ayant évolués, les mails ont désormais aussi leur valeur juridique :

« Une ordonnance comportant des prescriptions de soins ou de médicaments peut être formulée par courriel dès lors que son auteur peut être dûment identifié, qu’elle a été établie, transmise et conservée dans des conditions propres à garantir son intégrité et sa confidentialité, et à condition qu’un examen clinique du patient ait été réalisé préalablement, sauf à titre exceptionnel en cas d’urgence ».

Toutefois dans le cadre d’une urgence vitale, la loi ne clarifie pas la nécessité de prescription écrite. Une nébuleuse qui pose le problème des responsabilités partagées entre médecin et infirmier libéral ou IDE.

Quand l’urgence d’un geste vital en fait oublier les règles, comment un infirmier peut-il se protéger ?

En raison de plus en plus de cas urgents et d’hôpitaux surchargés, des affaires d’erreurs médicales occupent de plus en plus les tribunaux, malheureusement.

Si l’infirmier a pour obligation de prendre soin du patient en détresse vitale en l’absence du médecin, l’organisation hospitalière doit pouvoir lui fournir l’appui d’un médecin de garde encadrant les soins dispensés. Or, à priori selon vos commentaires sur la question sur notre blog Albus, les médecins se déplacent de moins en moins souvent. L’infirmier hospitalier ou libéral devient donc seul maître à bord des soins qu’ils prodiguent mais la responsabilité du médecin qui a été contacté et qui n’a pas pu (ou voulu…) se déplacer est aussi engagée de même façon.

En septembre dernier, nous vous rappelions par le biais d’un article, le protocole d’urgence à adopter pour l’infirmier libéral.

L’infirmier fait un bilan médical de la situation puis contacte les instances médicales nécessaires qui doivent lui indiquer les démarches à suivre. L’article R.4311-14 du Code de la santé publique est clair : « En l’absence d’un médecin, l’infirmier ou l’infirmière est habilité, après avoir reconnu une situation comme relevant de l’urgence ou de la détresse psychologique, à mettre en œuvre des protocoles de soins d’urgence, préalablement écrits, datés et signés par le médecin responsable ».

Si tel n’est pas le cas et que les secours médicaux tardent à arriver, n’hésitez surtout pas à communiquer ces dysfonctionnements graves aux instances médicales supérieures. En relatant le défaut de prise en charge par écrit grâce par exemple à une fiche d’« événement indésirable ».

Quand bien même si la pression exercée par celui qui est en tort est forte, une infirmière témoigne d’ailleurs sur le blog Albus qu’elle a été convoquée « par le chef de service d’où je travaillais car j’ai refusé d’appliquer une prescription par téléphone, le médecin de garde habitant trop loin pour se déplacer l’écrire! !! Y a vraiment un problème ! !! Et ce sera toujours l’infirmière la responsable pas le médecin intouchable !! ».

Que vous soyez infirmiers libéraux ou infirmiers en hôpitaux, les règles et les responsabilités de chacun sont partagées. Si l’erreur est humaine, pensez à vous protéger des erreurs des autres en relatant les faits qui vous semblent incohérents ou illégaux afin de faire cesser des pratiques qui ne devraient avoir lieu et qui vous empêchent de prodiguer des soins de qualité à vos patients.

Et vous, infirmières et infirmiers libéraux, avez-vous déjà refusé de prendre des prescriptions à l’oral ? Avez-vous déjà eu à gérer seul des cas de détresses vitales de vos patients ? Si oui, avez-vous rapporté ces faits ?