On parle souvent de la maltraitance ordinaire, lorsque l’on évoque les séjours en EPHAD notamment. Mais, cette souffrance invisible et indicible se retrouve aussi au domicile des patients, plongeant alors les infirmières et les infirmiers libéraux face à de nouvelles responsabilités.

 

La maltraitance, un sujet encore tabou pour les professionnels de santé ?

Il suffit de feuilleter un magazine médical, un site Internet ou même les journaux d’information générale pour y lire tel ou tel article, consacré à la maltraitance des patients. Que ce soit à l’hôpital ou dans tout autre établissement de santé, mais aussi à domicile avec l’intervention d’infirmières et infirmiers libéraux, la maltraitance des patients a été décrite sous toutes ses formes. Les multiples chartes, définissant les droits du Patient et les obligations des professionnels de santé, encadrent cette souffrance indicible et invisible. Nous n’allons pas, à nouveau, lister les sources et les causes de cette souffrance, tant elles sont nombreuses et variées.

Avouons toutefois, que la douleur, longtemps considéré comme l’une des principales causes de cette maltraitance, est bien mieux prise en charge que par le passé. Les progrès sont spectaculaires en la matière, mais la maltraitance ne se limite pas à cette seule douleur physique.

La maltraitance, une souffrance invisible difficile à évaluer

Que ce soit dans le cadre de l’intervention d’une infirmière ou d’un infirmier libéral, ou encore dans celui d’un EPHAD, les patients peuvent souffrir de multiples maux. La solitude, suite à une visite repoussée par une obligation ailleurs, les soins dispensés à un horaire ne convenant pas au rythme naturel du patient, le sentiment de n’être pas entendu voire même écouté, l’absence d’informations précises quant à l’évolution de son état de santé, ….ne sont que des exemples de cette « maltraitance ordinaire ».

Une des principales raisons rendant difficile voire même impossible le diagnostic de cette maltraitance ordinaire réside dans le fait qu’elle n’est pas causée par un acte malveillant ni même par un oubli ou une faute du personnel soignant. L’IDEL, devant décaler un rendez-vous pour faire face à une obligation urgente, n’entend pas nuire à son/sa patient(e), tout comme les infirmières en EPHAD ne souhaitent pas perturber leurs patients lorsqu’elles décalent son heure de coucher ou de lever.

La maltraitance n’est pas due directement et volontairement aux infirmières et/ou infirmiers libéraux, ni même aux autres professionnels de santé, mais est induite par les conséquences de décisions et d’actes en apparence anodins.

La bientraitance, une volonté et une ambition affichée de la part des IDEL(s)

Conscients des conséquences néfastes de ces décisions considérées comme banales et courantes, les IDEL(s) comme plus généralement les professionnels de santé, adaptent leur comportement et leur décision. Puisque la maltraitance psychologique est aujourd’hui mieux connue, on peut alors en limiter la portée. C’est un exercice délicat surtout pour les infirmières et infirmiers libéraux, qui ne peuvent pas se reposer sur une structure plus organisée. Face à leurs responsabilités, les IDEL(s) se doivent donc de dispenser les soins nécessaires, tout en tenant compte de l’environnement extérieur (logement, relations sociales, famille, …). Ce sont, exactement comme pour la maltraitance, des facteurs invisibles et qui occupent néanmoins une bonne partie du quotidien des IDEL(s).

Car à l’hôpital comme à domicile, l’ambition des infirmières et infirmiers, libéraux ou non, consiste bien à soigner leur patientèle. Ces professionnels savent plus que quiconque, que la bientraitance ne se résume pas à des soins prodigués dans les « règles de l’art ». Une surveillance médicale, un pansement à refaire, une injection à programmer, une toilette….Les infirmières ne sont pas de simples exécutantes de soins. Chez une patiente, un simple sourire ou quelques mots échangés seront tout aussi importants aux yeux du patient, qui échappera ainsi à la maltraitance ordinaire. Chez d’autres, l’échange se devra d’être un peu plus long pour apaiser aussi les maux du quotidien.

Les Infirmières et infirmiers libéraux, des soignants et des accompagnants au quotidien !

Ne nous cachons pas derrière cette réalité. La maltraitance des patients n’est pas une invention de l’esprit. Elle existe bel et bien, y compris pour des patients suivis à leur domicile par des infirmières et infirmiers libéraux. Cependant, ces derniers ont pris la mesure de la souffrance, qu’elle peut engendrer et s’efforcent, dans la mesure du possible, d’y apporter une réponse adaptée. Tous les actes des IDEL(s) ne sont pas codifiés, et le sourire d’une infirmière à sa patiente ou la bonne humeur d’un infirmier vis-à-vis de son patient sont et resteront hors nomenclature.

Des progrès sont certainement encore à réaliser sur certains aspects de la maltraitance, et la recherche progresse à grand pas chaque jour. Mais l’évocation de ce sujet, passionnant et pourtant souvent laissé dans l’ombre, amène aussi une autre interrogation, tout aussi sensible : qu’en est-il de la maltraitance des IDEL(s) ?

Infirmières et infirmiers libéraux, comment faites-vous face à cette maltraitance ordinaire et invisible ? Comment agissez-vous au quotidien, et quels sont selon vous les solutions à explorer pour améliorer la prise en charge de vos patients ?