Même si l’époque est marquée par la contestation de la profession infirmière, elle restera gravée dans les mémoires de la profession. C’est en effet le 27 novembre dernier qu’a été officiellement publié le code de déontologie des Infirmières et des Infirmiers.

Les infirmières libérales disposent désormais de leur propre code de déontologie

Il aura fallu attendre longtemps, très longtemps pour que la profession infirmière bénéficie à son tour d’un code de déontologie. Ce dernier est l’objet de toutes les attentions depuis plus de 7 ans, et la rédaction du texte a soulevé tant d’opposition, de questionnements et de tergiversations, qu’il est impossible d’en dresser ici la liste exhaustive. Rappelons juste pour mémoire, que la rédaction de ce code de déontologie a été décidé en même temps que fut instauré l’Ordre National des Infirmiers (loi du 21 décembre 2006) et que l’Autorité de la Concurrence avait dénoncé, en mai dernier, une vision archaïque de la publicité pour les infirmières libérales de la version précédente.

Mais toutes ces hésitations sont désormais levées, puisque le dimanche 27 novembre 2016, le décret de création a été publié au Journal Officiel. Le code de déontologie des Infirmières et Infirmiers a donc depuis une valeur légale et il se substitue à l’ensemble des règles professionnelles, figurant jusque-là dans le Code de la Santé Publique.

A travers une centaine d’articles, ce nouveau code de déontologie définit les droits et les devoirs des infirmières, et ce quel que soit leur statut ou leur lieu d’exercice. Ce sont bien des règles communes qui ont été adoptées pour encadrer le quotidien des plus de 600.000 infirmiers et infirmières de France. Opposable à tous, ce code de déontologie ambitionne donc d’expliciter les relations entre les infirmières et leurs patients, les infirmiers entre-eux mais aussi les relations avec les autres professionnels de santé.

L’Ordre National des Infirmiers (O.N.I.) s’est félicité de cette officialisation en soulignant : « Il s’agit donc d’une modernisation et d’un enrichissement de ces règles déontologiques afin de mieux prendre en compte les évolutions majeures observées ces 20 dernières années »

Les soins infirmiers au cœur de la démarche initiée par ce code de déontologie

Avec l’officialisation de cette publication, l’ambition est bien de se concentrer sur le rôle essentiel de l’infirmière dans la prise en charge des patients. Désormais, ce code de déontologie prévaudra sur toutes autres considérations économiques ou financières et c’est bien le quotidien des infirmières et des infirmiers qui s’en retrouve renforcé. C’est ce qu’expliquait Didier Borniche, président de l’ONI, en écrivant : « En tant que corps professionnel, nous avons besoin d’être reconnus et respectés. Le code de déontologie est un élément fédérateur qui permet le primat des valeurs de notre profession sur une toute autre exigence, dans un contexte où la rentabilité financière a tendance à prendre le pas sur la qualité des soins et la sécurité des patients »

Si cette publication a lieu à une période tendue pour les infirmières libérales comme pour les infirmiers libéraux (les manifestations initiées en novembre continuent sous d’autres formes), elle a déjà permis à certaines organisations syndicales de faire entendre que désormais, les infirmières refuseraient la mise en danger de leurs patients (sous-effectifs, glissements de tâches, …) en s’appuyant sur ces nouvelles règles.

Le même code pour les infirmières libérales et les infirmiers hospitaliers ?

Alors que les lieux et les conditions d’exercice se multiplient et se diversifient, le code de déontologie pose le principe que ces règles sont communes à tous les infirmiers de France. C’est un code rédigé par les infirmiers pour les infirmiers. C’est du reste ainsi qu’il a été présenté : « Le code a donc été élaboré à la suite d’une grande concertation à laquelle plus de 1500 infirmiers ont participé. Quel que soit leur mode d’exercice, le code de déontologie des infirmiers vient donc renforcer la place de l’infirmier comme maillon essentiel dans la prise en charge du patient »

C’est aussi et surtout un code moderne, qui tient compte des évolutions de ces dernières décennies. Ainsi, le droit des patients a été pris en compte notamment en ce qui concerne les attentes de ces derniers pour les soins de proximité (infirmières libérales). La fin de vie et l’accompagnement des patients chroniques font aussi partie de ces transformations, alors que le code de déontologie des Infirmiers ne s’épargne pas les règles relatives à la politique générale de la Santé en France et on pense bien évidemment à l’évolution ambulatoire de ces dernières années. Initié par les infirmiers eux-mêmes, le code de déontologie revient même sur des thématiques plus économiques, avec la recherche incessante de productivité et toutes les conséquences que cela implique pour la profession.

Quels changements pour les infirmiers et infirmières de France ?

Au quotidien, le code de déontologie s’est donné 4 objectifs principaux, pour lesquels les règles professionnelles et d’éthique s’appliqueront en s’adaptant aux différentes formes et lieux d’exercice :

  1. Le patient: Il s’agit de prendre en compte l’intérêt des patients.Les infirmières et infirmiers disposent désormais d’un véritable corpus, couvrant tous les aspects de ces droits des patients : secret médical, liberté d’être informé ou pas, la prise en compte de l’environnement familial et social, d’éventuelles maltraitances, ….
  2. La profession infirmière: Avec l’élargissement continuel du champ de compétences de l’infirmière, le code de déontologie entend clarifier la place prépondérante de la profession dans le parcours de santé du patient
  3. La protection des infirmières et des infirmiers: Cet aspect doit protéger les infirmières et les infirmiers au quotidien, tant en ce qui concerne la confraternité et la probité que pour ce qui touche aux images néfastes à la réputation de la profession, …
  4. Le renforcement de l’Ordre National des Infirmiers: Il ne faut pas maquer cet aspect du code de déontologie, qui vise à accroître les prérogatives de l’ONI (autorisation de remplacement, sanctions disciplinaires, …).

 

Et du côté des infirmières libérales, quelle est la portée exacte de ce code de déontologie ?

Les infirmières et infirmiers libéraux sont, au même titre que tous les autres infirmiers de France, soumis à ce code de déontologie, qui, faut-il le rappeler, ne révolutionnera pas l’activité quotidienne des IDEL(s). Après avoir rappelé les fondements même de la profession, le code revient ainsi dans son article 20 sur la nécessaire prise en charge de la fin de vie. « L’infirmier a le devoir de mettre en œuvre tous les moyens à sa disposition pour assurer à chacun une vie digne jusqu’à la mort. » L’infirmière libérale ne trouvera donc pas de nouveaux outils ou moyens pour l’aider dans sa tâche, mais pourra néanmoins s’appuyer sur ces déclarations de principe, définissant et régissant la profession infirmière.

Certaines des dispositions du code de déontologie sont néanmoins spécifiques aux infirmières libérales. Ainsi l’article 35 réaffirme la responsabilité de l’infirmière libérale dans la gestion et la protection du dossier de soin de chaque patient : L’infirmier veille, quel que soit son mode d’exercice, à la protection du dossier de soins infirmiers contre toute indiscrétion. Lorsqu’il a recours à des procédés informatiques, il prend toutes les mesures de son ressort afin d’assurer la protection de ces données. »

Dans son article 68, le texte interdit à l’infirmière libérale de s’installer dans un immeuble abritant déjà un confrère, sans en avoir reçu l’autorisation de ce dernier ou de l’ONI. L’article 69, quant à lui, rappelle l’interdiction faite aux infirmières libérales de proposer une communication publicitaire : Les seules indications que l’infirmier est autorisé à diffuser par voie d’annuaire ou de tout autre support accessible au public, notamment sur un site internet, sont ses nom, prénoms, adresse professionnelle, numéros de téléphone, de télécopie, adresse électronique professionnels, titre de formation lui permettant d’exercer sa profession, et horaires de permanence, à l’exclusion des coordonnées personnelles. »

Sans créer de rupture, le code de déontologie reste donc la retranscription des usages courants actuels. Seul le temps pourra préciser si les infirmières libérales et/ou hospitalières s’approprient ce nouvel outil dans l’exercice quotidien de leur profession. Accessible directement en ligne, le code de déontologie marque néanmoins la première étape vers une reconnaissance encore plus renforcée du statut de l’infirmière dans le parcours de soins, et c’est ici que réside le véritable enjeu.

Selon vous, le code de déontologie va-t-il représenter un changement pour votre quotidien ? Estimez-vous que cela représente une avancée significative pour les infirmières libérales notamment ? Existe-t-il, d’après-vous, des chapitres à revoir ou même à insérer dans ce code de déontologie ?