L’infirmière libérale peut-elle et doit-elle toujours dire OUI ?

Même si l’infirmière libérale se doit de respecter les règles éthiques et déontologiques de la profession, elle se doit aussi de s’organiser comme elle le souhaite, l’amenant à refuser certaines demandes de patients. La situation d’une famille de Perpignan permet de revenir sur ce sujet délicat.  

A Perpignan, un patient n’arrive pas à trouver une infirmière libéral

L’histoire n’est pas unique en France, mais elle apporte un nouvel éclairage aux débats sur la santé en général et sur les déserts médicaux en particulier. Tout commence, il y a plus de deux mois, lorsque le père de cette famille de Perpignan bénéficie d’une ordonnance prescrivant la prise en charge par une infirmière libérale 3 fois par jour. C’est donc sans crainte, que la famille commence à rechercher une infirmière libérale, qui devra, comme le stipule l’ordonnance, intervenir également les dimanches et les jours fériés. Le département des Pyrénées Orientales compte près de 1.300 infirmières libérales, et pourtant cela semble se révéler insuffisant au vu de l’augmentation des demandes de prise en charge.

La famille constate rapidement, que trouver une infirmière libérale va être difficile et plus elle multiplie les appels, et plus la situation devient difficile. Souffrant de problèmes respiratoires et cardiaques depuis des années, cet homme de 67 ans essuie ainsi 40 refus en un peu moins de deux mois. La situation devient traumatisante pour la famille, qui contacte alors la Caisse Primaire d’Assurance Maladie mais aussi l’hôpital de Perpignan.

Une situation difficile à vivre pour le patient mais aussi pour les infirmières libérales

L’épouse du patient explique même, que la famille est prête à accepter des sacrifices pour trouver l’infirmière libérale, qui pourrait accepter cette prise en charge. « On était même prêt à n’accepter qu’une visite par jour. On aurait fait le nécessaire. Mais, même ça, on nous le refuse, en nous laissant livrer à nous-mêmes« . L’épouse a même du mal à masquer son incompréhension, plaisant à se rappeler que lorsqu’ils habitaient à la campagne, « jamais une infirmière ne nous a refusé un rendez-vous ». Elle comprend donc d’autant moins qu’elle ne puisse pas trouver une professionnelle dans une grande ville comme Perpignan.

« C’est ahurissant d’en arriver là dans une grande ville »

Interrogée par le quotidien régional L’Indépendant, une infirmière libérale constate cette situation délicate en soulignant : « Les professionnels sont sélectifs et des cabinets décident de fonctionner au ralenti. (…) Certains sont pères ou mères de famille et ont des obligations. »

Il n’est pas certain, que ces propos rassurent cette famille, qui se dit prête à saisir les pouvoirs publics

Désert médical ou faille d’un système au bord de l’asphyxie ?

On pense immédiatement aux déserts médicaux, en imaginant que la ville de Perpignan serait concernée par cette désertification médicale. Et pourtant, il n’en est rien, puisque la ville de Perpignan est même classée en zone sur dotée pour les infirmières libérales, et le document de la CPAM a été mis à jour à fin novembre 2017. On se retourne alors vers les propos de l’infirmière libérale interrogée et la famille comprend ainsi, que les infirmières libérales de Perpignan ne sont plus de la capacité d’accepter une prise en charge aussi lourde avec 3 passages chaque jour.

La situation n’est pas spécifique à Perpignan, comme nous avions pu le constater lors d’un dossier consacré à au refus de soins par les infirmières libérales. Car en la matière, excepté pour les situations d’urgence, l’infirmière libérale est en droit de refuser des soins pour des raisons professionnelles ou personnelles. La notion même de « raisons professionnelles ou personnelles » reste très vague, d’autant plus qu’elle doit en outre répondre aux principes de permanence et de continuité des soins. Chaque infirmière libérale pourra donc s’organiser comme elle le souhaite (et avec 3 passages par jour, on peut comprendre que l’organisation s’en trouve chamboulée) et refuser la prise en charge de soins. Il ne s’agit pas de se prononcer sur cette situation spécifique à cette famille de Perpignan, mais bien de souligner que les déserts médicaux n’expliquent pas, à eux seuls, tous les dysfonctionnements qui peuvent être révélés ici et là en ce qui concerne les infirmières et infirmiers libéraux. C’est ce que nous expliquait déjà Pascalita Vaissierès en écrivant : « Il arrive un moment où nous sommes bien obligés de dire non. Ce n’est pas du travail à la chaîne. Une amie avait des ATC et l’infirmière libérale ne coupait même pas le moteur de la voiture. Dans ces cas-là, il vaut mieux diriger vers un autre cabinet ! »

Et vous, que pensez-vous de cette situation ? Des solutions vous apparaissent-elles possibles pour ne plus connaître ce genre de situations ? Etes-vous confronté à ces demandes que vous ne pouvez pas accepter ?