Un accord a été trouvé pour les infirmières et infirmiers libéraux

 

Le sujet des négociations conventionnelles concentre l’attention des infirmières et des infirmiers libéraux depuis plus de deux ans. Pourtant, le 12 mars dernier, un accord a enfin été trouvé entre les syndicats représentatifs des infirmières libérales et l’Assurance Maladie. Un accord, qui fait déjà grincer des dents certains IDEL(s), alors qu’il faudra attendre quelques jours pour qu’il soit officialisé.

Les négociations conventionnelles des infirmières libérales aboutissent enfin

 

Plus personne n’y croyait, même si toutes les parties prenantes étaient pleinement conscientes que les négociations conventionnelles des infirmières libérales devraient nécessairement aboutir pour ne pas pénaliser une profession en pleine mutation. On a déjà beaucoup écrit sur ce calendrier interminables des négociations conventionnelles entre les infirmières libérales et l’Assurance Maladie. Toujours est-il que ce mardi 12 mars 2019, les trois syndicats représentatifs des infirmières et infirmiers libéraux et l’Assurance Maladie se sont enfin mis d’accord sur un texte. Ce dernier sera définitivement validé dans quelques jours avant une signature officielle prévue à la fin de ce mois de mars 2019. On ne devrait plus connaitre de surprises de ce côté-là, à moins que les syndicats représentatifs décident de tenir compte de la contestation naissante des infirmières et infirmiers libéraux au quotidien.

Car si on peut se féliciter de cet accord, qui va permettre à la profession de passer à autre chose et de se concentrer sur les enjeux qui se posent pour la transformation du système de santé, force est de constater, que celui-ci ne suscite pas l’adhésion totale ni même une satisfaction exagérée. Présidente de Convergence Infirmière (CI), Ghislaine Sicre explique ainsi : « Bien sûr qu’on aurait aimé obtenir davantage, mais il faut se rappeler qu’on partait de très loin ».

 

« Bien sûr qu’on aurait aimé obtenir davantage »

 

Par rapport à la dernière réunion, les infirmières libérales ont réussi à obtenir plus que les 300 millions d’euros proposés par l’Assurance maladie en février dernier. L’accord trouvé le 12 mars repose donc sur 365 millions d’euros de revalorisations, une somme à échelonner sur les 3 prochaines années.

Un des piliers de cet accord repose sur la prise en charge de la dépendance notamment à travers le Bilan de Soins Infirmiers (BSI), qui va donc se substituer à la Démarche de soins infirmiers (DSI). Cela devrait permettre, selon les syndicats, de surmonter les problématiques liées à la notion de temps, dénoncées depuis des années par les infirmières libérales sur le terrain. Avec cette mise en œuvre du BSI, c’est l’expertise de l’infirmière libérale qui est valorisée et cela devrait aussi normaliser les relations entre les IDEL(s) et les Caisses régionales, puisque de nombreuses procédures en réclamation d’indus reposaient sur l’interprétation de cette notion de temps. La présidente du Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (Sniil), Catherine Kirnidis explique que cette décision « met en évidence nos compétences propres et non plus uniquement les compétences prescrites ».   Ce forfait journalier pourra être cumulé avec certains autres actes, alors qu’il est accordé aux infirmières libérales la possibilité d’externaliser certains actes, jusque-là intégrés dans des forfaits. En voyant dans cette mesure une avancée notable pour les IDEL(s), Ghislaine Sicre résume parfaitement cette évolution en expliquant : « Aujourd’hui, quand je vais faire un soin d’hygiène et que je dois aussi faire des soins du diabétique, tout est inclus dans le forfait hygiène. Demain, je pourrai comptabiliser le soin d’hygiène, plus les soins du diabétique en deuxième acte. »

Des avancées pour les infirmières libérales au quotidien, mais à quel niveau ?

Au-delà de cette prise en charge de la dépendance, l’accord revient sur la modification de la nomenclature générale des actes professionnels (NGAP). Les syndicats, représentant les infirmières et les infirmiers libéraux, reconnaissent qu’ils n’ont pas réussi à obtenir la revalorisation des lettres-clefs, revalorisation pourtant déjà acquise par d’autres professions. En revanche, ils insistent sur des avancées sur le sujet, notamment avec la création de nouveaux actes. Ces derniers sont principalement liés au virage ambulatoire, décidé par le Ministère de la santé, comme le retrait d’une sonde urinaire ou celui de redons. L’accord a également élargi la préparation des doses à tous les patients atteints de troubles cognitifs et non plus uniquement pour les patients psychiatriques. Daniel Guillerm, président de la Fédération Nationale des Infirmiers (FNI) se félicite de cette avancée : « Nous aurons par exemple des bilans de médication pour le maintien des patients à domicile ou pour les bilans initiaux de plaie complexe ».

La déception peut être grande pour les infirmières libérales, qui n’ont pas obtenu la vaste revalorisation qu’elles réclamaient. En revanche, avec cette création du bilan initial de prise en charge des plaies complexes, les syndicats veulent voir une preuve de plus de la reconnaissance de l’expertise infirmière, faisant de l’infirmière libérale bien plus qu’une simple exécutante.

Un troisième dossier est repris dans cet accord, qui ambitionne de renforcer la régulation démographique de la profession. Être plus en phase avec la réalité du terrain, voilà l’objectif de ces mesures, à commencer par le renforcement de l’Accessibilité potentielle localisée (APL). A terme, les infirmières et infirmiers libéraux installés dans des zones très sous-dotées bénéficieront d’aides supplémentaires afin de garantir la viabilité de leur mode d’exercice.

Une victoire pour les infirmières libérales ou un statu quo désolant ?

Depuis le 12 mars, certaines infirmières et infirmiers libéraux ont déjà fait entendre leur déception face à un accord qui ne va pas, selon eux, assez loin. En s’exprimant sur les réseaux sociaux ou sur des forums spécialisés, les IDEL(s) veulent rappeler les ambitions fortes qui existaient à l’ouverture de ces négociations conventionnelles. Les syndicats, de leur côté, justifient leur décision, comme l’explique Catherine Kirnidis : « On peut toujours obtenir mieux mais cela fait bientôt deux ans que nous travaillons sur cet avenant, il était devenu urgent d’obtenir un accord ». Ce n’est donc pas un enthousiasme débordant, qui caractérise les trois syndicats quelques heures après cet accord que l’on peut quand même qualifier d’historique (au vu des déboires de ces négociations conventionnelles). Le vice-président délégué de la Fédération nationale des Infirmiers, Mr Julien Maulde-Robert résume parfaitement la situation : « Nous aurions pu rêver de plus, mais il y a un principe de réalité, les budgets sont là. » C’est donc un accord à minima, qui a été adopté ce 12 mars 2019. Si les représentants peuvent se satisfaire de celui-ci, après des mois de négociations intenses, ils n’en sont pas moins conscients, que le compte n’y est pas au vu des demandes initiales. Les syndicats attendent donc désormais de signer officiellement cet accord, et le Ministère de la Santé devrait organiser cette officialisation le 29 mars prochain. Il faudra donc attendre quelques jours supplémentaires pour que les infirmières libérales puissent réellement passer à autre chose, et c’était attendu, puisqu’à partir du 18 mars, le projet de réforme du Système de Santé en France sera examiné par la représentation nationale, ce qui garantit, là-encore, des discussions houleuses et tendues. Les infirmières et infirmiers libéraux entendront-ils les appels au calme lancés par les syndicats et notamment par Daniel Guillerm :« Nous avons été jusqu’au bout de ce que nous pouvions obtenir, même si les esprits chagrins nous diront que nous n’avons pas obtenu assez ».

 

Et vous, que pensez-vous des accords obtenus après des négociations conventionnelles interminables ? Estimez-vous, que des réponses efficaces et adaptées sont apportées aux problématiques de la profession ? Estimez-vous qu’il fallait sortir de cette situation ubuesque en signant absolument un accord ?