Bien souvent les infirmières et infirmiers libéraux s’expriment ici ou là pour dénoncer les causes qui ont conduit peu à peu à ce que l’on nomme la désertification médicale. Ces débats soulèvent le plus souvent bien des problématiques, depuis les questions d’interprétation pour le calcul des indemnités horokilométriques (IK) jusqu’à l’accompagnement proposé pour lier les infirmières libérales au vaste plan de développement de la télémédecine, plan mis en œuvre avec la Réforme Ma Santé 2022. Bien que les infirmières libérales et autres professionnels de la santé rejoignent souvent les patients eux-mêmes dans ce constat de la désertification médicale, c’est une autre voix, qui s’est fait entendre au début du mois de mars.

Jacques Toubon, défenseur des droits, présentait ainsi le 11 mars dernier la publication du Rapport d’activité 2018 du défenseur des droits. Ce document présente les actions innombrables menées par les services de cette institution, et le domaine de la santé y est fréquemment évoqué, notamment en ce qui concerne cette question des déserts médicaux. En effet, un des objectifs du défenseur des droits consiste à garantir l’égalité entre tous les citoyens sur l’ensemble du territoire, et force est de constater que l’objectif n’est pas atteint et ne semble pas en passe de l’être.

Les déserts médicaux, une menace pour les patients et pour ….les infirmières libérales

Après avoir rappelé que le désengagement de l’Etat des territoires de l’Hexagone constitue un véritable danger pour certaines et certains (le sentiment d’abandon ou de délaissement reste fréquent sur certains territoires), le rapport insiste que la tendance actuelle de la dématérialisation ne répond pas aux problématiques du sentiment d’isolement des administrés face à la disparition de bon nombre d’administrations. Les territoires sont de moins en moins attirants pour la population, pourquoi le seraient-ils pour les infirmières libérales et autres professionnels de santé, lorsque ces derniers doivent choisir leur lieu d’installation. Le constat de « services publics de plus en plus distants des usagers » serait un facteur aggravant pour les régions déjà menacées de désertification médicale.

Jacques Toubon s’est déclaré de plus en plus sollicité par des «  témoignages, des appels à l’aide qui émanent d’usagères et d’usagers ne parvenant pas à trouver un nouveau médecin traitant, un ou une spécialiste, un infirmier ou une infirmière à domicile ». En ce qui concerne les médecins généralistes, la situation est préoccupante, puisque comme le rappelle le défenseur des droits, ne pas pouvoir choisir un médecin traitant éloigne les patients du parcours de soins coordonné. La qualité des soins pose alors problèmes, sans parler des problèmes de remboursement, que cela peut engendrer.

Mais les infirmières et infirmiers libéraux ne sont pas épargnés par cette évolution de la démographie médicale en France. Pourtant le défenseur des droits explique que si « dans la plupart des cas, les soins relèvent de l’offre privée, l’accessibilité aux services de santé dépend étroitement de l’offre de soins sur le territoire national ». En d’autres termes, il souligne que l’impossibilité de trouver une infirmière libérale met en exergue une certaine responsabilité de l’Etat, qui est en charge de la bonne répartition de ces professionnels de santé sur l’ensemble du territoire.

Qu’il s’agisse des infirmières libérales ou des médecins, cette désertification médicale représente donc une violation manifeste du droit d’égalité de traitement et de soins pour les patientes et les patients. Le Défenseur des droits évoque aussi dans son rapport un autre domaine, dans lequel le droit à la santé n’est pas respecté. Il dénonce ainsi le caractère discriminatoire des refus de soins, en pointant notamment les mentions visant spécifiquement les patientes et patients, bénéficiant de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C), de l’ACS ou encore de l’AME.

Le rapport insiste sur la nécessité de réagir, sans préciser si les décisions doivent intervenir des autorités publiques ou si elles doivent être prises par les professionnels de santé eux-mêmes. Dans tous les cas, il souligne que son rôle a été rempli en informant chacune des parties prenantes de la réalité de la situation. Les pouvoirs publics, comme les infirmières libérales, ne pourront pas invoquer leur méconnaissance de cette situation dans les mois ou les années à venir.

 

Et vous, avez-vous conscience des problèmes posés par cette désertification médicale ? Quelle pourrait être la voie à suivre, selon vous, pour sortir de cette situation ?