Alors que la téléconsultation a déjà fait réagir de nombreuses infirmières et infirmiers libéraux, ces derniers s’alarment de la mainmise de certaines sociétés sur le marché. Une intrusion qui ruine les ambitions de toute une profession d’accompagner cette évolution du système de santé en France. 

La téléconsultation, l’avenir pour le médecin généraliste et l’infirmière libérale

Depuis le 15 septembre 2018, les téléconsultations ont démocratisé la télémédecine et ont surtout fait connaître cette nouvelle forme de consultations médicales au grand public. Les avantages apparaissent évidents pour les patients, puisque la consultation à distance évite les déplacements (couteux et chronophages) et raccourcit les délais pour accéder à son médecin généraliste. De leur côté, les médecins généralistes se félicitent de cette avancée. Vice-président de la Fédération des médecins de France (FMF), le Dr Claude Bronner souligne même : « En pratique, 80 % des pathologies peuvent être suivies avec la télémédecine. Elle est très utile pour traiter les maladies bénignes qui ne nécessitent pas d’examen clinique approfondi, comme une gastro ou un rhume, et assurer la prise en charge des maladies chroniques. La téléconsultation fait gagner du temps à tout le monde« .

Pour les médecins, la téléconsultation permet aussi de travailler plus « tard » le soir ou au cours des week-ends, puisque la téléconsultation peut-être faite depuis n’importe quel lieu, permettant de garantir la confidentialité des données. Dans la pratique, le médecin peut se faire assister d’une infirmière libérale qui sera présente aux côtés du patient. Mais dans tous les cas, la téléconsultation exige du médecin généraliste un interrogatoire plus détaillé, puisque l’examen clinique n’est pas permis.

La télémédecine pour rapprocher les infirmières libérales des médecins généralistes

En voulant accélérer le déploiement de la téléconsultation, le Ministère de la Santé entend bien apporter une autre solution pour lutter contre la problématique des déserts médicaux. Mais la télémédecine répond aussi à un autre objectif porté par les autorités publiques : favoriser la coordination entre les différents professionnels de santé, et notamment entre les infirmières et infirmiers libéraux et les médecins. A ce jour, l’ambition semble démesurée, puisque si le gouvernement tablait sur 500.000 actes en 2019, seules 16.000 téléconsultations avaient été remboursées par la Cnam en mai 2019. Le pari de d’un million de téléconsultations en 2020 semble bien ambitieux pour être tenu ?

Les réticences s’expliquent par les hésitations des patients. Près d’un patient sur deux (48 %) estime ainsi qu’une téléconsultation n’offre pas les mêmes garanties qu’une consultation classique. Du côté des médecins, les avantages organisationnels ne masquent pas la déshumanisation redoutée par les médecins face à ces consultations virtuelles. Les médecins soulignent enfin l’investissement financier conséquent, qui doit être réalisé au départ pour réaliser ces téléconsultations détaillées dans les meilleures conditions, à savoir un local dédié et équipé des outils électroniques, et la présence d’une infirmière libérale pour faire le lien entre les patients et le médecin.

Les cabines de télémédecine, une alternative à la présence des infirmières libérales ?

 

Mais si la télémédecine répond à des enjeux de santé publique, elle constitue aussi un marché attrayant sur un aspect purement financier. Aussi voit-on des startups s’engager sur ce terrain avec notamment l’installation de cabines spécialement réservées à la téléconsultation. Relié en vidéo à un médecin généraliste, le patient, pénétrant dans ces cabines de soins, est guidé pas à pas dans l’utilisation des différents appareillages nécessaires à la consultation 2.0. Du thermomètre au stéthoscope, en passant par le tensiomètre ou l’oxymètre, tous ces outils permettent au patient de réaliser sa propre auto consultation sous les directives (et le contrôle) d’un médecin, qui n’est plus alors contraint de faire appel à une infirmière libérale.

Et c’est cette ambition des plateformes de téléconsultations, qui veulent profiter de la télémédecine, qui peut faire peur aux infirmières libérales. Ces dernières pourraient alors être écartées de cette évolution du système de santé français. Là, où les médecins généralistes dénoncent la déshumanisation des consultations et le risque d’ »ubérisation » de leur profession, les infirmières et infirmiers libéraux, eux, condamnent cette mise à l’écart, alors que la profession semblait armée pour répondre à ces nouveaux défis.

Et vous, considérez-vous que la télémédecine soit une avancée pour le système de santé en France ? Et pour les infirmières et infirmiers libéraux ?