Les infirmières libérales pour sortir de la crise des urgences ?

Les urgences en France sont en crise, et on entend de nouveau parler de reconnaitre les infirmières et infirmiers libéraux comme des professionnels de santé de premier recours. Des études existent pour souligner l’intérêt et les bénéfices d’une telle démarche, alors que les conditions en France semble réunies pour envisager une telle évolution.

 

Des infirmières et infirmiers en remplacement des médecins généralistes

 

Être reconnus comme des professionnels de santé de premier recours, la demande des IDEL(s) n’est pas nouvelle, mais elle bénéficie aujourd’hui d’une des rares études menées sur le sujet. Publiée en 2018, une revue de littérature (Laurent M et al. Nurses as subsitutes for doctors in primary care. Cochrane Database of Systematics Reviews, 2018, 7. 16 juillet 2018) a mis en avant les bienfaits du remplacement des médecins par des infirmières et infirmiers dans les pays dits développés. Face au vieillissement de la population, à la multiplication des pathologies et au manque de médecins, la solution présente en effet de nombreux avantages pour permettre à nos systèmes de santé de se renouveler et de se transformer. Et le résultat est plutôt favorable aux infirmières puisque l’étude conclut : « La prestation de services de soins de santé primaires par des infirmiers(ères) plutôt que par des médecins mène probablement à une santé similaire ou meilleure pour les patients et à une plus grande satisfaction des patients »

Si l’étude souligne que les consultations prodiguées par des infirmières et des infirmiers ont tendance à être plus longues que celles des médecins eux-mêmes, elle atteste également que les prescriptions ne sont, quant à elles, pas plus nombreuses ni même plus longues. Cette revue de littérature a également permis de mettre en avant la satisfaction des patients, qui avouent préférer être suivis par des infirmières ou infirmiers plutôt que par des médecins. En mettant en évidence que cette solution représente une réponse à la baisse du nombre de médecins, l’étude va même plus loin en notant que « (…) les patients ont probablement des résultats similaires ou meilleurs dans des domaines de la santé tels que les maladies cardiaques, le diabète, les rhumatismes et l’hypertension artérielle. » Cette étude représente donc un argument de poids pour les infirmières et les infirmiers de ces pays occidentaux, qui connaissent tous la même problématique.

Les infirmières libérales de France, des professionnels de santé de 1er recours

 

La situation du système de soins en France répond aux même problématiques décrites par l’étude. Ainsi, face à la crise des urgences que traverse la France, Agnès Buzyn, Ministre de la Santé, a expliqué que cette « crise des urgences est le symptôme des dysfonctionnements du système de santé : en amont, par le manque d’accès aux soins non-programmés de nos concitoyens et en aval, par des difficultés internes d’organisation des hôpitaux. »

Reprenant les arguments d’un grand nombre d’infirmières et infirmiers libéraux, le Sniil (Syndicat National des Infirmières et Infirmiers Libéraux) a ainsi publié un communiqué pour faire état de propositions, qui permettraient une sortie rapide de cette crise des urgences. Le Sniil propose ainsi « la reconnaissance des infirmiers comme professionnels de santé de 1er recours et la création de la notion d’ »infirmier référent » ». Cette demande permettrait de valoriser les compétences des infirmières et infirmiers libéraux, dont l’action quotidienne serait une réponse immédiate à l’engorgement des services d’urgences. Le syndicat représentant les IDEL(s) souligne que la décision n’est que politique, nécessitant le courage des décideurs face à une situation jugée critique. Les infirmières et infirmiers libéraux auraient, avec l’adoption de cette mesure, la possibilité « d’intervenir en première ligne dans le cadre de leur rôle propre sur appel du patient ou de son entourage pour orienter la personne vers la structure de soins la plus appropriée (urgences, médecin traitant…) et coordonner ainsi son parcours. Une intervention directe de l’infirmière, dans le cadre de ses compétences, pourrait aussi être possible pour résoudre certains problèmes par exemple chute, malaise, dyspnée… Autant d’actions qui désengorgeraient les urgences… »

Bien que la demande ne soit pas nouvelle, elle constitue néanmoins désormais une solution à une crise majeure de notre système de santé, ce qui pourrait accélérer la prise de décision. Les oppositions à cette décision restent cependant nombreuses et féroces. Alors, les infirmières libérales comme professionnelles de santé de premier recours, une évolution inéluctable ou une utopie vouée à ne rester qu’une idée parmi tant d’autres ?

D’après vous, la décision pourrait-elle être prise ? Quels sont les blocages les plus résistants selon vous ?