La traditionnelle opposition entre l’infirmière libérale et sa consœur hospitalière ne représente plus le reflet d’une réalité, qui a longtemps existé. Aujourd’hui les formes d’exercice sont multiples et de plus en plus d’infirmières et infirmiers libéraux choisissent de combiner leur profession avec une activité salariée dans un établissement de santé, un réseau de soins ou autre. Cet exercice mixte est-il appelé à devenir une tendance forte au sein de la profession infirmière ?

L’infirmière libérale, une professionnelle de santé impactée par les ambitions du gouvernement

Les décisions du ministère de la Santé sont prises avec l’ambition de réformer en profondeur le système de Santé publique en France. Bien que la crise sanitaire du coronavirus ait fait émerger de nouvelles exigences (et on se reportera aux négociations entreprises au cours du Ségur de la Santé), les ambitions à moyen et long terme restent identiques. Avec la transformation de l’Hôpital public et la généralisation des soins ambulatoires mais aussi de l’hospitalisation à domicile (HAD), les autorités publiques souhaitent notamment :

  • Un exercice coordonné pour les professionnels libéraux de santé. Des CRPS aux maisons de santé pluriprofessionnelles, les initiatives en la matière se sont multipliées et ont profondément transformé la réalité d’une infirmière libérale ou de tout autre soignant dit de ville,
  • Une meilleure coordination entre la ville et l’Hôpital. Et les pistes de progrès ne manquent pas en la matière, alors que ces relations figurent dans les socles nécessaires pour poursuivre cette transformation du système de santé.

Ayant donc des répercussions directes sur les infirmières libérales notamment, ces ambitions du ministère de la Santé se heurtent aussi au manque chronique de personnel au sein de la fonction publique hospitalière, une pénurie qui n’est pas sans conséquences sur l’organisation du travail de certains IDEL(s) notamment.

Quand les infirmières libérales sont aussi des infirmières salariées !

A l’horizon 2022, c’est-à-dire demain, l’exercice isolé doit devenir « l’aberration », selon les propres termes des autorités publiques. L’infirmière libérale comme l’ensemble des professionnels libéraux de santé devra donc demain collaborer et travailler « en groupe », même si, en la matière, les approches sont aussi nombreuses que diverses. Dans tous les cas, on constate une évolution constante des infirmières combinant exercice libéral et mixte. En se basant sur les données du répertoire Ameli, on est ainsi passé de 12 % de la profession exerçant en libéral à 2010 à 17.68 % au 1er janvier 2020 (131.575 infirmières et infirmiers libéraux pour un total de 744307 infirmiers en France). Si l’appel à des professionnels libéraux de santé est désormais bien ancré dans les habitudes des établissements hospitaliers et/ou de santé, le recours à des infirmières libérales peut aussi atténuer les conséquences néfastes de la pénurie de personnel, évoquée ci-dessus. C’est donc dans l’air du temps de voir l’exercice mixte gagner du terrain année après année, et le phénomène ne devrait pas s’inverser dans les prochaines années.

Peu de données sures et fiables existent au sujet de l’exercice mixte, et bien que ce dernier s’inscrive dans le projet de transformation de notre système de santé, il répond aussi aux nouvelles aspirations des infirmières et des infirmiers. Qu’il s’agisse de diversifier la nature de ses revenus, de compléter une rémunération jugée insuffisante ou de développer de nouvelles compétences à travers une activité « annexe », les infirmières profitent des nombreuses possibilités offertes en la matière. Cumuler le statut d’infirmière libérale avec un emploi salarié (ou une vacation) peut aussi satisfaire à la quête de sens, à l’envie de « retrouver sa vocation » et participe donc à cette quête du « mieux-être au travail ». Dans tous les cas (infirmière hospitalière voulant tester le statut de libéral avant de franchir le pas définitivement, infirmière libérale s’engageant avec un établissement de santé pour élargir ses compétences, …), concilier deux activités distinctes constitue également, il ne faut pas le nier, des contraintes spécifiques avec deux emplois du temps à gérer en simultané, deux approches distinctes avec lesquelles il faut jongler, …. Est-ce le modèle d’exercice qui sera privilégié dans les années à venir ?

Et vous, que pensez-vous de cet exercice mixte ? Le pratiquez-vous et sous quelles formes ? Estimez-vous que ce mode d’exercice est appelé à se développer encore et encore ?