Le projet de code de déontologie de l’Ordre National des Infirmiers vient d’être vivement mis en cause par un avis de l’Autorité de la Concurrence. Ce dernier souhaite que les spécificités des IDEL(s) notamment soient mieux prises en compte. 

Un code de déontologie pour les IDEL(s), une nécessité ou un devoir ?

En créant l’ordre infirmier, la loi du 21 décembre 2006 précisait qu’un code de déontologie, préparé par le Conseil national de l’ordre des infirmiers (CNOI) devait être adopté sous la forme d’un décret en Conseil d’Etat. Il aura fallu 4 ans pour qu’un projet soit remis au ministère de la Santé, dirigé, en 2010, par Roselyne Bachelot. Cependant depuis, aucun ministre n’a souhaité publier ce projet, notamment en raison de fortes contestations de la part de la fonction publique hospitalière. Pour se conformer à la loi l’ordre des Infirmiers avait saisi le Conseil d’Etat, et ce dernier avait donné droit à cette demande, menaçant le Ministère de la Santé de sanctions financières (astreintes) en cas de manquement à ces obligations.

Le projet de code de déontologie a donc été présenté le 04 février dernier au Haut Conseil des professions paramédicales (HCCP) et devait faire l’objet d’un examen par l’Autorité de la Concurrence et le Conseil d’Etat. Et le code de déontologie est l’objet des très fortes réserves, émises dans un avis de 28 pages, rendus par …l’Autorité de la Concurrence.

Quand l’Autorité de la Concurrence se penche sur la situation des infirmiers libéraux

Certains s’étonneront que l’Autorité de la Concurrence ait son mot à dire s’agissant de la profession d’IDEL. Les infirmières et infirmiers libéraux font en effet partie des professions de santé les plus réglementées. Pourtant en revenant sur les règles d’installation de ces IDEL(s), le Code de Déontologie des Infirmiers fausse les règles édictées par cette autorité de la Concurrence. Pourtant, tout dans la profession d’infirmière et d’infirmier libéral, est réglementé, depuis les conditions d’installation jusqu’aux tarifs pratiqués. Contrairement à d’autres professions de santé, les IDEL(s) ne sont qu’exceptionnellement autorisés à des dépassements d’honoraires, et voient donc leurs tarifs imposés par l’Assurance Maladie.

Leur liberté d’installation est même plus restreinte que les autres professionnels de santé, puisque l’Assurance maladie et les IDEL(s) se sont accordés en 2008 sur un dispositif de régulation, visant à lutter contre les « déserts médicaux » notamment.

Concernant l’exercice libéral de la profession infirmière, l’Autorité de la Concurrence estime que ces contraintes sont trop nombreuses et faussent les règles.

Vers un code de déontologie tenant plus compte de la réalité des IDEL(s)

L’avis de l’Autorité de la Concurrence rappelle ainsi que si les IDEL(s) ne représentent que 16 % des infirmiers au total, leurs droits ne peuvent être bafoués. Ils soulignent ainsi la nécessité de permettre aux infirmières et infirmiers libéraux de communiquer sur leur diplôme spécialisé et de rendre cette communication autorisée sur Internet. L’avis insiste également sur la nécessité d’accompagner et de favoriser la création de cabinets d’infirmiers libéraux, allant même jusqu’à s’étonner que ces cabinets soient empêchés de recruter une autre infirmière libérale.

Ainsi peut-on lire dans cet avis argumenté de manière précise : « Les modalités d’exercice de la profession, telles que le remplacement, la collaboration, le salariat, la communication doivent dans ce contexte, et dans le respect des règles de l’art et de la santé des patients, être d’autant plus libérales »

L’Autorité de la Concurrence dénonce le manque d’imagination de l’ordre national des Infirmiers, qui se serait, selon elle, contenté de reprendre des dispositions déjà existantes dans d’autres codes, sans les adapter aux spécificités des infirmières libérales. Selon cet avis, le code de déontologie devrait s’adapter aux réalités et à l’avenir de la profession pour le bénéfice tant des patients que des professionnels.

L’ordre national des Infirmiers a pris acte de cet avis et a fait savoir qu’il allait soigneusement examiner (l’avis) afin d’envisager d’éventuelles évolutions de notre projet. Une nouvelle version de ce code de déontologie devrait très rapidement être présenté. Ce rappel aux règles de l’ONI est un facteur aggravant dans le manque de légitimité, dont est souvent accusé cet ordre. C’est pourquoi, l’ONI se félicite de l’appel de l’Autorité de la concurrence à ce que les pouvoirs publics veillent particulièrement à l’inscription de tous les infirmiers.

Pensez-vous que ce code de déontologie va changer quelque chose dans votre quotidien ? Estimez-vous qu’une nouvelle version plus conforme aux réalités d’aujourd’hui soit possible ?