La récente décision du tribunal correctionnel de Montpellier atteste, que les infirmières et les infirmiers libéraux peuvent se faire entendre face aux reproches et condamnation des CNAM et autres organes administratifs. Mais comment faire pour justifier de sa bonne foi et de son intégrité ?

Du cas particulier au cas général, la défense des infirmières et des infirmiers libéraux

Nous nous sommes déjà fait l’écho des procédures, engagées par les autorités sanitaires contre les infirmières et les infirmiers libéraux. Ces réclamations d’indus se multiplient ces derniers mois, et le rapport de la Cour des Comptes, qui a suscité tant de réactions, ne devrait pas réduire le nombre de ces procédures. S’il apparait inutile de revenir sur l’origine de cette inflation procédurière de la part des Cnamts notamment, un exemple précis de ces actions judiciaires mérite d’être expliqué plus en détails, puisqu’elle a vu l’infirmière libérale incriminée faire reconnaitre le bien-fondé de ses arguments. Une infirmière libérale de Montpellier a été relaxée par le tribunal correctionnel, devant lequel elle comparaissait pour avoir… trop travaillé.

La Caisse Primaire d’Assurance Maladie de l’Hérault a donc demandé le remboursement d’indus à cette IDEL, au prétexte que selon les calculs effectués, les 185.000 euros d’actes facturés entre 2011 et 2013 n’auraient pas pu être accomplis. Selon ces mêmes estimations, la CNAM soulignait donc que même des journées de travail de 24h00 n’auraient pas permis d’accomplir l’ensemble des actes infirmiers facturés. L’organisme a alors saisi la justice pour récupérer ce qu’il considérait être des indus, puisque comme l’explique l’avocat de la CNAM, Maître Cauvin : Soit les temps de soins étaient faux, soit la qualité de ces soins n’était pas au rendez-vous

Qualité ou quantité, quand le travail des IDEL(s) est remis en cause

Si nous évoquons ce cas particulier, c’est qu’il traduit (malheureusement) une situation qui a tendance à se multiplier. On ne compte plus les procédures de ce genre qui se multiplient et la suspicion, jetée sur la profession infirmière, par les magistrats de la Cour des Comptes, ne devrait pas apaiser cet accroissement spectaculaire des actions engagées contre les IDEL(s).

Le raisonnement (et donc les procédures qui en découlent) sont toujours les mêmes : on reproche aux infirmières et infirmiers libéraux un nombre trop important d’actes de soins. Dans tous les cas, les faits reprochés plongent les IDEL(s) des années en arrière, puisque les faits incriminés concernent des soins effectués deux, trois, ou même quatre ans auparavant. Cette chronologie rend la défense alors bien plus difficile, d’autant plus qu’au fil du temps, de nouvelles dérives se font jour comme, par exemple, le refus de considérer les soins effectués le jour d’une entrée ou sortie d’une hospitalisation comme justifiés.

Les procédures engagées reposent alors sur deux reproches récurrents : ou alors le nombre d’actes réalisés par l’infirmière ou l’infirmier libéral est trop élevé, et c’est alors la quantité qui est clairement visée (en clair, l’IDEL est accusé de fausses factures ?). Ou alors, c’est le temps passé à la réalisation de ces soins infirmiers, qui est contesté, et c’est alors au tour de la qualité des soins d’être pointée du doigt. (En clair, l’IDEL est accusé d’avoir mal fait son travail.).

Professionnalisme et suivi, la défense nécessaire des infirmières et des infirmiers libéraux

Dans le cas particulier de cette infirmière libérale montpelliéraine, les magistrats ont débouté la CNAM, estimant que les soins mis en cause pouvaient tous être prouvés, et qu’il est donc ainsi prouvé qu’aucun soin fictif ne peut lui être reproché. Mais c’est aussi la mauvaise utilisation de la nomenclature (NGAP) qui a été mise en avant avec la défense de l’IDEL de Montpellier. Les CPAM se bornent, en effet, à une application purement (oserait-on pousser le qualificatif jusqu’à bêtement) arithmétique.

Quelques minutes de moins ne retirent en rien la justification d’un AIS 3, par exemple, d’autant plus que la complexification des dossiers médicaux mais aussi le vieillissement de la patientèle des cabinets d’infirmières et d’infirmiers libéraux rendent quasi impossible l’analyse acte par acte.

Il ressort de cet exemple particulier, que si les CNAM doivent s’adapter (et donc mieux connaître l’activité quotidienne des IDEL(s)), les infirmières et infirmiers libéraux doivent se préparer à devoir se justifier plus fréquemment. Le recours à un dossier de soins électronique permet de satisfaire à cette dernière exigence. Quant à la première, le chemin va être long et difficile, tant la prise de conscience (de la CNAM et des autorités sanitaires) s’annonce difficile. Pour preuve de cette difficulté, le parquet s’est empressé de faire appel de la décision rendue au bénéfice de l’infirmière libérale de Montpellier ?

Infirmières et infirmiers libéraux, comment jugez-vous cette position de la CNAM vis-à-vis des soins, que vous prodiguez au quotidien ? Avez-vous déjà été confronté à pareille situation ? Et surtout, êtes-vous prêt à affronter cette expérience difficile et douloureuse ?