N’attend-on pas trop des infirmières et des infirmiers libéraux ? Les médecins, les patients et leur famille, les autres professionnels de santé ne se reposent-ils pas trop sur la passion qui anime les infirmières et les infirmiers libéraux ? Les IDEL(s) peuvent-ils tout connaître et savoir tout utiliser ?

L’infirmière libérale, une soignante avant tout et dans toutes les situations

Nous nous sommes déjà interrogés sur la responsabilité de l’infirmière libérale face à une ordonnance illisible et indéchiffrable. Dans le meilleur des mondes, l’infirmière libérale n’aurait qu’à exécuter les prescriptions du médecin, mais nous savons que souvent, la compréhension difficile de ces « pattes de mouches » oblige l’IDEL à faire preuve de responsabilités et à s’appuyer sur ses connaissances pour comprendre ce que voulait précisément dire le médecin. Le débat est sans fin, mais il renvoie à la mission première des infirmières et des infirmiers libéraux : soigner et accompagner les patients.

Les IDEL(s) ont en effet reçu une formation infirmière et non pas les rudiments pour entamer une carrière de paléographe. Cette problématique, que nous avions donc abordée, a donc replacé l’expertise de l’IDEL au centre des questions. La formation médicale des infirmières, libérales ou hospitalières, doit rester l’objectif prioritaire, et il est bon de rappeler une telle évidence à une époque, où les propositions de réforme se multiplient. Cela étant dit, cette question en soulève d’autres, qui relève de la même problématique notamment en ce qui concerne l’utilisation d’équipements de plus en plus sophistiqués. Un tragique fait divers met en lumière les exigences de plus en plus fortes et toujours plus nombreuses, auxquelles sont soumis les IDEL(s).

L’IDEL, un spécialiste des équipements technologiques dernier cri ?

Dans la Somme, un tribunal s’est en effet penché sur une affaire incriminant une infirmière libérale. Cette dernière, accusée d’homicide involontaire, est soupçonnée d’avoir fait une erreur de réglage sur une pompe à morphine d’une patiente : 40,00 au lieu de 00,40. La patiente, atteinte d’un cancer, décéda le lendemain de cette dramatique erreur. Il ne nous appartient pas de porter un jugement ou un avis sur ce dossier précis, et le tribunal d’Amiens, dont le verdict est attendu pour le 08 septembre prochain, est en charge du dossier. Nous comprenons la douleur des proches de la défunte et notamment le mari, qui invectivait l’IDEL : « Vous avez tué ma femme, vous avez tué ma femme ! ». Mais nous sommes également pleinement conscients du cauchemar, vécu par cette infirmière libérale, qui expliquait ne pas connaître cette machine spécifique.

Et le problème est bien là. Les innovations technologiques permettent de développer des équipements de plus en plus sophistiqués, de plus en plus complexes à comprendre et donc à programmer. Certes, les formations existent mais à chaque nouvel appareil, de nouvelles consignes viennent contredire les anciennes, de nouveaux réglages viennent modifier les précédents.

L’infirmière libérale, entre l’obligation de soins et le devoir de précaution !

Il faut avoir vécu la situation pour le comprendre, et seuls les IDEL(s) et les autres professionnels de santé peuvent comprendre à quel point il peut être difficile de s’adapter à l’utilisation de tel équipement de telle ou telle marque. Nous comprenons l’impossibilité de suivre une formation spécifique pour chaque appareil utilisé, et pourtant la méconnaissance ou une connaissance trop approximative conduit inéluctablement à des erreurs. Avec des emplois du temps déjà très surchargés, qui sont, en eux-mêmes, facteurs de stress, l’infirmière ou l’infirmier libéral découvrant une machine inconnue au chevet de son patient ne pourra pas consacrer une heure voire une demi-heure dans l’étude minutieuse de la formation d’utilisation. Devrait-il alors refuser les soins au prétexte qu’il ressent l’impossibilité d’utiliser ces outils dans les « règles de l’art » ? Comme pour une ordonnance incompréhensible évoquée ci-dessus, la réponse s’impose comme une évidence. A la lecture des faits évoqués devant le tribunal de la Somme, nous sommes, dans un premier temps, convaincus qu’il ne fallait pas effectuer de réglages « dans le doute ». Mais en réalité, combien d’infirmières auraient refuser de soulager la patiente ? Combien d’IDEL(s) auraient pris le temps d’exiger l’intervention d’un formateur ? …. Car en la matière, il n’existe qu’une seule vérité : les IDEL(s) ne peuvent pas tout connaitre et être en mesure d’utiliser tous les équipements existants sur le marché…

Qu’auriez-vous fait dans pareille situation ? Avez-vous déjà été confronté à une situation semblable ? Quelle a été votre réaction ?