C’est un sujet, sur lequel les témoignages sont aussi rares que poignants. On évoque souvent la maltraitance des patients, le burnout des salariés, le harcèlement des femmes, ….Et pas un mot sur la maltraitance ordinaire et quotidienne, dont peuvent être victimes les infirmières et les infirmiers libéraux !

 

Les infirmières et infirmiers libéraux, des victimes en puissance ?

Il ne s’agit pas de plaindre une profession toute entière, bien au contraire mais juste de souligner les risques et les réalités, que connaissent déjà les IDEL(s) et plus généralement tous les professionnels de santé. Il ne se passe pas une semaine sans qu’un média s’interroge, d’une manière ou d’une autre, sur la maltraitance des patients. Mais s’arrête-t-on sur la souffrance des soignants eux-mêmes ? Comment cela, les soignants seraient d’éventuelles victimes s’offusqueront celles et ceux, qui n’ont jamais séjourné dans un hôpital ou qui n’ont pas eu besoin de faire appel à une infirmière libérale.

Et pourtant la maltraitance vis-à-vis des infirmières libérales existe bel et bien. Il ne s’agit pas, et heureusement, de violences physiques mais de violences morales voire même de harcèlement. Les IDEL(s) ont dans leur patientèle de plus en plus de personnes âgées, bénéficiant de cette noble ambition, décidée dans l’intérêt de la Santé Publique, de maintenir les patients le plus longtemps possible à domicile. Vous n’avez donc jamais vu « Tatie Danielle », cette satire sociale décrivant méchanceté et cruauté de la part de patients n’acceptant pas leur état dégradé. Ce n’est certes pas une généralité, mais chaque infirmière libérale connait (ou connaitra) sa Tatie Danièle. Un patient bien sous tous rapport lorsqu’il se trouve en public, et qui, une fois seul avec son infirmière ou son infirmier libéral, se montre odieux voire injurieux.

Une généralisation des tracas quotidiens à l’origine d’une maltraitance avérée

Que dire de ces patients, qui renvoient leur IDEL sur un coup de tête avant de la supplier (ou de lui ordonner, cela dépend des caractères) de revenir. Tous les infirmiers libéraux de France ont déjà connu ces sautes d’humeur, auxquels ils ont dû faire face. Doit-on s’étendre sur les patients, qui sans prévenir (bien évidemment), décident unilatéralement un changement d’horaire de la visite de leur IDEL. Avec des emplois du temps surchargés, les IDEL(s) se retrouvent alors devant le casse-tête de l’organisation.

Tous les patients d’une infirmière libérale ne se retrouvent pas dans ces situations du quotidien, mais toutes les infirmières libérales et tous les infirmiers libéraux savent à quel point, ces petits travers peuvent gâcher la vie.

Certes, chaque cas, pris individuellement, ne constitue pas un cas de maltraitance, mais représente bien une situation de stress, auquel l’IDEL doit faire face. Se multipliant à longueur de journée, et de semaine en semaine, ce stress peut rapidement devenir une forme de maltraitance, d’autant plus qu’elle se rajoute aux obligations de la profession infirmière.

Les IDEL(s) en première ligne face à la détresse des patients et des familles

Pour couronner le tout, les infirmières libérales, en tant que soignant le plus facilement accessible, doivent fréquemment servir de lien entre leurs patients d’une part et les familles de ces derniers ou les médecins d’autre part (« J’ai reçu ces papiers du docteur mais je comprends pas ce que ça veut dire, vous pouvez m’expliquer  »).

Toute cette pression s’ajoute aux difficultés liées directement à la fonction même d’IDEL. C’est bien l’infirmière ou l’infirmier libéral, qui est, chaque jour, face à la souffrance et à la détresse de ses patients. Quelle que soit la réaction de ces derniers, l’infirmier libéral doit le soigner et l’accompagner. La mission infirmière inclut cette confrontation difficile à vivre, mais c’est une cause de stress supplémentaire.

Enfin, les stigmatisations des infirmières libérales, que nous avons déjà évoquées, les tracasseries administratives (relations avec les caisses, les mutuelles, …) en tout genre, …viennent encore aggraver la situation. Il s’agit bien au final d’un malaise profond, assimilable à de la maltraitance, même s’il est impossible de donner un nom à l’auteur de celle-ci.

Sujet tabou, la maltraitance des IDEL(s) reste une thématique, que les infirmières elles-mêmes n’évoquent que très rarement. Ce silence alourdit un peu plus encore ce sentiment de harcèlement, dont se sentent victimes les IDEL(s) jusqu’au jour où …

Avez-vous conscience de cette forme singulièrement de harcèlement, dont est victime votre profession ? La ressentez-vous au quotidien, et comment faites-vous pour gérer la situation au mieux ?